Si certains peuvent, parfois de bonne foi, confondre monocratie et monarchie, il importe toujours de distinguer l’une de l’autre, et rappeler que jamais, au grand jamais, M. Macron ne pourra, aux yeux de l’histoire comme de la raison politique, être considéré ou confondu avec un roi au sens capétien du terme : « Scar ne sera jamais Mufasa », pourrait-on dire en clin d’œil au dessin animé de Walt Disney Le Roi lion, sorti en 1994, à la fin du double septennat de feu François Mitterrand… Tout élu du suffrage universel qu’il est, un président n’est jamais qu’un élu d’une partie des Français contre l’autre : c’est d’un duel fratricide renouvelé tous les cinq ans que naît un président… Comment, alors, pourrait-il être un arbitre reconnu naturellement par ceux qui l’ont combattu ? On ne peut être juge et partie, dit le proverbe.
Dans la Monarchie royale, ce qui peut, de prime abord, paraître pour un défaut est, en fait, une qualité nécessaire : le roi n’est pas élu par le suffrage universel, il n’a pas été choisi, il ne s’est pas soumis au verdict des électeurs… Habitués que nous sommes à désigner le Chef de l’Etat en une élection qui, hommage du vice à la vertu, peut apparaître comme « la reine des élections », il est parfois difficile de renoncer à ce qui nous est perfidement présenté comme un droit : pourtant, inconsciemment pour nombre de nos compatriotes, cette élection apparaît tronquée, sinon truquée, et beaucoup s’en détournent, même si elle reste l’élection la plus courue, voire la plus politique. Or, plus encore qu’un scrutin forcément diviseur et de moins en moins « fondateur » du Pouvoir, c’est bien la succession héréditaire, au sein d’une lignée connue et reconnue de longue date, sans l’intervention du corps électoral , qui peut fonder les conditions d’un arbitrage d’État, à travers la magistrature suprême de celui-ci incarnée par le roi et plus encore, par une famille, une dynastie qui n’a pas besoin de plaire par démagogie mais qui se doit d’assumer, par obligation principielle, la continuité et l’amour des familles et des personnes, sans distinction entre ceux qui votent et ceux qui ne votent pas, ceux qui y croient et ceux qui n’y croient pas…
La Monarchie royale française est, par nature, arbitrale et non arbitraire : c’est son mode même de transmission qui assure cet arbitrage qui n’est pas neutralité mais « juste décision », et c’est le fait de ne rien devoir à ceux qui, d’ordinaire, « font » l’élection (partis, groupes de pression, passions des ambitieux, etc.), qui permet cette indépendance nécessaire à tout l’art de l’arbitrage. « La naissance ne s’achète pas », dit-on naturellement, et c’est indéniable : le fils du souverain n’a pas choisi de naître « fils de », et pourtant, il l’est et, même s’il voulait s’en émanciper, il ne serait pas possible d’effacer cette parentèle qui, plus que des droits, fixe des devoirs et engage une responsabilité qu’il n’a pas demandée et pour laquelle il n’a pas milité quand il aurait l’âge de le faire… Si les électeurs ne le choisissent pas, il ne choisit pas non plus d’être roi, le jour venu, quand son prédécesseur quitte ce bas-monde…
Est-ce à dire que l’arbitre-roi ne peut pas être remis en cause ? Si, bien sûr, c’est possible, et les monarchies contemporaines, n’échappent pas aux critiques, voire aux contestations. Mais ces dernières restent souvent limitées et le caractère familial de la Monarchie royale et de son mode de succession entraîne une certaine reconnaissance du « fait royal » qui lui garde plus de légitimité propre que n’en ont les gouvernements et les chanceliers, premiers ministres et autres qui, pourtant élus, apparaissent beaucoup plus « provisoires » que la magistrature suprême de l’État incarnée par un roi ou une reine. Dans la Monarchie active « à la française » que nous souhaitons, le même phénomène serait d’autant plus renforcé que le monarque renouerait avec l’idée d’un Etat central fort mais, dans le même temps, fédéral et reconnaissant des pouvoirs multiples à tous les échelons de la société et de l’unité française. Arbitrale, la Monarchie royale doit suivre les règles qui sont celles de la société historique et politique française, qui peuvent être résumées ou exprimées dans une Charte constitutionnelle : si elle décide, ce n’est pas arbitrairement, c’est, d’abord, souverainement et dans le souci obligé de la justice et de la justesse, en arbitre soucieux de l’intérêt de la nation elle-même. Il n’est pas dit que cela soit toujours facile : pour autant, l’indépendance statutaire de la magistrature suprême de l’Etat sous la Royauté autorise l’espoir que le pire soit toujours, ou le plus souvent, écarté…
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