Jeudi matin, j’ai assuré mes derniers cours de l’année scolaire sur les pelouses de la cour d’honneur du lycée, devant la chapelle du Couvent de la reine, sous l’il vigilant de Fénelon et Bossuet et le regard sûrement attendri de la reine Marie Leczinska et de ses filles Il faut avouer que le temps s’y prêtait, et que les salles surchauffées du lycée ne me semblaient pas permettre de bonnes conditions d’attention des élèves : d’ailleurs, ceux-ci ont apparemment apprécié cette « escapade » studieuse qui coïncidait pour la classe de Seconde avec l’évocation d’une période souvent oubliée de l’Histoire de France, celle de 1814 à 1848, c’est-à-dire des Monarchies post-révolutionnaires qui ont tenté de renouer le fil tranché le 21 janvier 1793 par le régicide.
Beaucoup de mes élèves n’avaient aucune connaissance de cette tentative, persuadés (comme beaucoup de nos concitoyens ) que la Monarchie était morte avec Louis XVI. Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe sont d’ailleurs souvent évoqués sur une seule double page des manuels d’Histoire de Seconde et leur sort est ainsi mêlé (scellé ?) pour de nombreuses générations de lycéens, du moins ceux qui ont prêté attention à une leçon qui est souvent traitée rapidement dans les semaines précédant les vacances, au moment où la mobilisation des élèves est logiquement plus difficile. J’ai essayé de rendre vie, en ce dernier cours de l’année, à ces trois rois si différents et de montrer en quoi c’est sous leur règne, qui survient après les convulsions révolutionnaires et l’Empire monocratique de Napoléon Ier, que la discussion politique et parlementaire s’est imposée en France, malgré le suffrage censitaire. Ce mode de suffrage, d’ailleurs, me semble être la grande erreur de ces Monarchies car il les prive d’un « sacre populaire » qui, s’il n’eut pas fait le roi, aurait assuré aux assemblées et aux institutions un rôle de représentation des opinions ayant cours dans le pays et ainsi évité les blocages dont les révolutions de 1830 et 1848 n’ont été, en grande partie, que les conséquences logiques. Le maintien du suffrage universel après la période révolutionnaire aurait enraciné véritablement les institutions monarchiques, au-delà des royalistes eux-mêmes. La question a d’ailleurs fait largement débat chez les monarchistes de cette époque, preuve s’il en est qu’être royaliste n’est pas la simple acceptation de la Monarchie, mais la réflexion et l’action nécessaires au bien et à l’efficacité de l’Etat, en vue du bien commun des citoyens et des communautés intermédiaires du pays.
A lire le récent ouvrage de l’ancien ministre gaulliste Jean Charbonnel sur « Les légitimistes, de Chateaubriand à de Gaulle », il est facile de comprendre qu’être fidèle à un Prince (ou à un principe) n’est pas être fasciné par celui-ci ou être un « béni-oui-oui » de la Monarchie et de celui qui l’incarne, mais être exigeant sur la politique de l’Etat et le servir d’autant mieux que l’on est capable de le discuter pour chercher à l’améliorer.
J’espère, au-delà de ce sujet évoqué ici, avoir suscité chez les auditeurs de mes cours de l’année ce qui est le moteur de la réflexion historique comme politique : la curiosité C’est elle qui, il y a bien longtemps déjà, m’a engagé sur la voie du royalisme
râh, des cours sur la pelouse...
Rédigé par : mays | 10 juin 2006 à 18:01
Mr Chauvin,
J´ai lu avec grand intérêt votre article sur la période passionnante de la restauration de 1815 à 1848.
Vous avez parfaitement raison de préciser que cette période est parfaitement inconnue de la grande majorité des francais qui pensent que la Monarchie en France est morte avec Louis XVI. Nous vivons dans une République qui préfère occulter cette période gênante pour son image. En effet nos institutions parlementaires sont nées à cette époque. Je suis également tout à fait d´accord avec vous sur le fait que si nos 3 derniers monarques avaient accordé le suffrage universel direct le cours de notre histoire aurait été différent. Il ne faut cependant pas oublier que tous les 3 étaient nés et avaient grandi sous l´ancien régime et que les changements opérés dans nos institutions étaient déjà pour eux extrêment importants. Si le fils de Louis Philippe n´était pas mort tragiquement dans un accident peut être que les choses auraient été différentes. En effet, ce jeune homme moderne voulait le suffrage universel direct mais son père lui répondit qu´il pourrait le faire lorsqu´il serait lui même Roi .... on connaît la suite.
Régulièrement j´acquière des livres et je me documente sur cette période fascinante et riche où la France était prospère et en paix.
Rédigé par : sylvainb | 15 juin 2006 à 00:18
Msr pourquoi n'avez vous pas fait part a vos attentifs premieres de cet épisode qui vous tient à coeur. C'etait l'occasion d'ouvrir l'une de vos légendaires parenthèses. En éspérant vous croiser
Rédigé par : élève | 20 juin 2006 à 20:19