J’étais vendredi sur la route qui mène à la Bretagne (pour un passage éclair de
2 heures), lorsque j’ai entendu cette citation destinée à être irrémédiablement condamnée par le chroniqueur « de gauche » d’une émission de variété sur une station de radio publique : « La nation française a un chic qui n’appartient qu’à elle ». Etait-elle de Charles Maurras ou de Maurice Barrès, nous interrogeait avec l’ironie facile de « celui qui sait » le brave chroniqueur tout empreint d’une ouverture d’esprit qui ne s’arrêtait sûrement pas aux misérables frontières historiques et nationales, tellement négligeables pour le citoyen germanopratin ? Mais non, c’est le désormais étiquetté « nationaliste Déroulède fashion », bien vivant et toujours souriant (agaçant, d’ailleurs, ce sourire permanent
), sorti du « Loft » du début des années 2000, le dénommé Steevy
qui a osé commettre cette phrase qui a tant choqué le chroniqueur. Quel scandale ! Oser évoquer une « particularité » française à l’heure du Grand Tout mondial ! Quelle faute de goût, foi de citoyen du monde
Enfin ! Grâce à l’indignation vertueuse de ce chroniqueur vigilant, quelques centaines de milliers d’auditeurs ont entendu des noms qu’on n’entend plus d’ordinaire si ce n’est dans des cénacles restreints de militants ou d’universitaires
Et surtout, une réflexion qui, même si elle émane d’un « amuseur », ne me semble pas déplacée pour autant
Après tout, n’est-ce pas l’honneur de notre pays d’avoir su garder une certaine « liberté de ton et d’esprit » qui lui fait, parfois, tenir tête aux grandes puissances de ce monde et soutenir les « faibles » dans cette jungle internationale ? Cela n’empêche ni les erreurs, ni les arrogances mal placées, ni les échecs. Mais il est de la vocation de la France, depuis que les rois capétiens ont commencé d’en tracer les contours, sur le plan physique comme sur le plan politique et diplomatique, de rejeter les idées d’ « Empire », qu’il soit supranational ou étranger, et d’ouvrir de nouveaux chemins, parfois éloignés des grandes autoroutes de la pensée dominante
Le brave chroniqueur radiophonique n’a sans doute pas compris cela, ne voulant voir dans la formule de Steevy (qui n’est pas, je vous rassure, ma référence suprême
) qu’une remarque chauviniste quand elle n’était que simple constatation, pas si futile que ça, d’une réalité historique et politique. D’ailleurs, si cette phrase avait été prononcée par le même personnage en 2003, au moment où la France s’opposait, presque seule et en tout cas la première en Europe, à l’intervention états-unienne (mal préparée et oublieuse du contexte particulier de cet endroit du monde) en Irak, sans doute ce même chroniqueur ironique n’aurait-il pas, dans l’ambiance de l’époque, relevé cette citation comme « nationaliste » mais l’aurait-il récupéré pour son compte.
A nier la particularité française, ce que certains nomment parfois « l’exception française », le chroniqueur se condamne à ne pas comprendre grand-chose aux courants, souvent contradictoires et pas toujours réfléchis, qui animent notre histoire nationale et populaire. Il montre aussi qu’il a, lui, renoncé depuis longtemps à peser sur la vie politique et internationale, à proposer et à assumer une alternative aux grands systèmes idéologiques et géopolitiques qui s’affrontent dans le monde contemporain. C’est fort dommage.
Et, avec Rostand et de Gaulle, avec (ou sans) Maurras et Barrès, j’accepte, quant à moi, de faire mienne cette citation qui, tout compte fait, aurait pu être signée par un Bernanos ou un Gary, par un Debray ou un Gallo, par un Aragon ou un Makine
Suf que l'Ode au Gépéou doit figurer bien en vue dans la bibliothèque du chroniqueur en question.
Rédigé par : | 13 février 2007 à 14:04
Les Allemands, en général très francophiles c'est indéniable, appellent la France "La Grande Nation", clin d'oeil à la fois tendre et ironique à notre pays qui, il faut bien l'avouer, a une propension certaine à vouloir illuminer le reste du monde de ses "lumières".
Rédigé par : Victoire | 13 février 2007 à 14:44