Les déclarations dominicales et guerrières (certes fortement « nuancées » ce mardi 18 septembre lors de son déplacement en Russie) de l’actuel ministre des Affaires étrangères M. Bernard Kouchner sur l’Iran, faisant suite à celle du ministre de la Défense M. Hervé Morin sur la réintégration complète de la France au sein de l’OTAN et à celles du président lui-même sur la nouvelle relation entre la France et les Etats-Unis, démontrent, à qui en douterait encore, un véritable « ralliement » à la politique, non pas seulement de M. George W. Bush, mais à celle, historique et géopolitique, des Etats-Unis. Sans doute faut-il y voir une « rupture » avec la politique du prédécesseur de M. Sarkozy et de son dernier premier ministre
En fait, plus gravement, c’est la destruction systématique d’une diplomatie indépendante de la France qui lui permettait souvent d’être un arbitre ou une référence pour qui ne voulait pas des « Empires ».
Si la politique du flamboyant Villepin était souvent celle du « panache et sabre de bois », faute de moyens suffisants et à cause d’un « briandisme » illusoire, elle avait au moins le mérite de placer la France comme une alternative possible à « l’hyperpuissance » états-unienne et d’en éviter l’effacement complet dans une Union Européenne qui pense plus avec son ventre qu’avec sa tête. Ce temps de la posture indépendante est, semble-t-il, terminé et la France est sommée de rentrer dans le rang et, pire, elle semble aller plus loin que ne lui demandent les Etats-Unis : s’agit-il, pour Nicolas Sarkozy, de prendre la place hier tenue par Tony Blair près de George W. Bush ?
Et pourtant ! Le fait que le nouveau président de la République, après son élection, fasse appel à Hubert Védrine pour rédiger un rapport sur « la place de la France dans la mondialisation » pouvait faire espérer une autre politique que celle actuellement suivie : il suffit de lire le texte des conclusions de ce rapport remis le 5 septembre au président pour s’en convaincre et voir toutes les possibilités qui s’ouvrent à la France, à la France qui n’est rien sans une claire conscience d’elle-même, sans cette liberté qui en fait la grandeur et, parfois aussi (il faut bien le reconnaître), l’étourdit ou l’aveugle lorsqu’elle l’absolutise et en oublie le « devoir de mesure » cher aux rois capétiens, comme le montre Villepin dans son dernier ouvrage sur Napoléon
« En résumé : continuer à avoir notre propre politique étrangère, repensée et reformulée, forte et intelligible, est un des éléments du sursaut français dans la mondialisation. Apaiser et régulariser une relation amicale mais non dépendante avec les Etats-Unis, réveiller l’Europe pour qu’elle devienne un pôle de puissance et utiliser tous nos leviers d’influence, anciens et nouveaux, pour défendre nos intérêts et propager nos idées. Anticiper, être inventifs. Au total, veiller aux intérêts des Français, prévenir les clashs qui menacent entre civilisations ou entre puissances, et faire un monde vivable et plus équitable ». Une politique française pour l’Europe et pour le monde qui ne laisse pas l’ambiguïté perdurer et cette impression désagréable d’un alignement sur nos encombrants alliés. Une politique qui n’oublie pas que « les alliances sont saisonnières » (De Gaulle) et qu’elles ne doivent pas devenir des carcans pour les Etats et les relations internationales. En somme, une politique diplomatique « capétienne »
Par les déclarations récentes de nos gouvernants, il ne semble pas que notre diplomatie en prenne le chemin : attention aux impasses
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