La Turquie est proche de l’Europe, c’est-à-dire qu’elle est sur le point d’entrer dans l’Union Européenne : je ne discute pas cette situation, je me contente d’en prendre acte, car ce n’est pas l’objet de la présente note.
En effet, la Turquie connaît une actualité qui, sur le plan politique comme géopolitique, n’est pas anodine. Ainsi, dans une indifférence totale de la presse française, a eu lieu un référendum portant sur le mode de désignation du président de la République : désormais le chef de l’Etat sera élu sur le modèle français au suffrage universel direct, élu pour cinq ans, renouvelable une fois. C’est le moyen, intelligent, qu’ont trouvé les « ex-islamistes » (c’est ainsi qu’ils sont qualifiés par « Le Monde ») de l’AKP, parti au pouvoir, pour contourner les obstacles posés par l’armée et les kemalistes, inquiets de la poussée des « confessionnels » et de leur volonté d’en finir avec l’ancien ordre laïque établi par le fondateur de la Turquie moderne sur le modèle de la IIIe République française (modèle d’ailleurs fort critiquable). L’évolution vers la modération des « ex-islamistes », conjuguée à la volonté d’intégrer dans de bonnes conditions l’Union Européenne, se poursuivra-t-elle ou, grisés par leurs succès électoraux et économiques, auront-ils tendance à « retrouver leurs fondamentaux », ce qui poserait de multiples problèmes à l’équilibre même de l’Union Européenne ? Ne préjugeons pas de l’avenir qui n’est jamais vraiment écrit avant que d’avoir lieu, même si cela n’empêche pas la prospective et la prudence, voire l’espérance selon les cas… Mais suivons cette actualité intérieure turque avec attention, car la Turquie n’est pas un « détail », elle est une puissance majeure de la Méditerranée, héritière de l’empire ottoman dont les rois de France se sont toujours préoccupés, sans aversion aucune dans la plupart des cas.
C’est aussi pour cela que les récentes attaques des séparatistes kurdes du PKK qui ont fait, pour la seule journée de dimanche 21 octobre, une douzaine de morts parmi les militaires turcs, sont inquiétantes car elles risquent d’entraîner un conflit supplémentaire dans une région déjà énormément déstabilisée sans profit depuis l’intervention états-unienne de 2003. La semaine dernière, le 17 octobre, le parlement turc a voté l’autorisation pour l’armée de mener une opération militaire au-delà des frontières du pays (c’est-à-dire, clairement, en Irak ou, plutôt, dans le Kurdistan irakien presque indépendant…), valable pour une durée d’un an. Dès hier, les hélicoptères turcs ont poursuivi les assaillants du PKK jusqu’à la région d’Amadya, à l’extrême nord de l’Irak, détruisant un pont et mitraillant des combattants kurdes. Devant une telle situation, le président irakien a demandé aux hommes du PKK de déposer les armes ou de quitter l’Irak, tout en annonçant que son pays se défendrait contre toute agression extérieure, ce qui paraît illusoire eu égard à la guerre interconfessionnelle (entre autres…) qui mine déjà Bagdad et le reste du pays, encore occupé par plusieurs armées étrangères. A moins que cela soit une occasion pour le pouvoir central irakien de reprendre pied et de réaffirmer son autorité dans une région largement autonome et riche en pétrole, ce qui n’est pas négligeable…
Les Etats-Unis, de plus, sont fort gênés dans cette affaire car les Kurdes d’Irak (souvent solidaires de leurs « frères » de Turquie) sont leurs seuls alliés sûrs dans ce pays livré à l’anarchie et, en même temps, ils ne peuvent se mettre à dos la Turquie, déjà très énervée depuis la semaine dernière par le vote des parlementaires états-uniens reconnaissant le « génocide arménien ».
Les difficultés des Etats-Unis à trouver une stratégie satisfaisante pour leurs propres intérêts sont une occasion d’affirmer une diplomatie française « médiatrice » qui reconnaisse le rôle prépondérant de la Turquie dans la région et s’investisse dans la construction d’un nouvel axe géopolitique Paris-Berlin-Moscou-Ankara qui soit une véritable alternative à la diplomatie atlantiste et « suiviste » des pays de l’Union Européenne majoritairement attachés à l’idée du « parapluie américain », véritable tombeau de l’indépendance du continent et de ses nations.
Oui, décidément, il ne faut pas négliger la Turquie et son actualité…
La Turquie est un acteur économique majeur au Sud-Kurdistan et il est bien improbable qu'elle ruine ses positions par une expédition militaire refusée par le président Talabani.
Les Kurdes d'Irak en ont soupé du PKK, mais is ne les livreront pas, ils les débanderont.
La France n'est pas convoquée dans cette affaire d'hommes. La pantalonnade libanaise où nous avons assisté à la destruction de notre "meilleur ami" au Proche Orient en "armant" seulement un ferry chypriote, a convaincu les acteurs régionaux que nous étions forts de la gueule, c'est tout !
Rédigé par : Catoneo | 24 octobre 2007 à 09:56