Depuis quelques années, j’évoque à mes élèves une forme de migrations encore inconnue des manuels scolaires mais rendue inévitable du fait des nouvelles données démographiques des principales puissances émergentes que sont la Chine et l’Inde : il s’agit des migrations sexuelles qui répondent au déséquilibre de plus en plus fort entre garçons et filles, au détriment de ces dernières. L’hebdomadaire Marianne vient d’y consacrer un très intéressant (et inquiétant) dossier qui rejoint mes propos et mes préoccupations sur ce sujet particulier, à travers (entre autres) un article de Luc Richard sur la situation démographique chinoise qui s’avère fort préoccupante : « La Chine aux 11 % de croissance manque de millions de femmes, ce qui précipite le pays dans une fracture démographique sans précédent. Le nombre de naissances est de 117 garçons pour 100 filles, selon les dernières statistiques. (…) Alors, à qui la faute ? A la politique autoritaire de l’enfant unique. Lancée en 1979 par le pouvoir communiste pour casser l’expansion démographique chinoise, elle limite à un seul le nombre d’enfant par couple, à l’exception des ruraux qui ont droit à un deuxième enfant si le premier est une fille. » Mais le problème du déséquilibre touche aussi les pays du « Nord » d’Asie comme la Corée du Sud ou Taïwan : « Dans ces sociétés asiatiques, qu’elles soient urbaines ou rurales, autoritaires ou non, la sélection s’exacerbe en cas de baisse de fécondité », en particulier parce que dans le monde asiatique, le garçon est valorisé comme le porteur du nom de la famille et « assurance » des vieux jours des parents. Et la modernité permet de choisir le sexe de l’enfant à venir ou, plus exactement, de savoir ce qu’il sera, dès les premiers temps de la grossesse : « C’est grâce aux techniques de l’échographie ou de l’amniocentèse, généralisées dans les années 80, qu’il est possible de connaître le sexe du fœtus. Bien qu’illégaux, les avortements sélectifs font disparaître chaque année environ 600 000 petites filles ». La science au service de la sélection humaine…
Ce dont s’inquiète aussi Martine Gozlan, qui voit au-delà même des tests prénataux les ravages d’une société scientiste digne, en définitive, du « Meilleur des mondes » d’Aldous Huxley : « Car les savants (…) inventent l’utérus artificiel. (…) L’ectogénèse en termes chics. Selon l’honorable biologiste Henri Atlan, « tout devra se passer dans une espèce d’incubateur assurant les fonctions normales d’un utérus, du placenta et de l’organisme maternel lui-même en tant qu’appareil nutritif et d’excrétion, ainsi que sources de stimulations diverses de plus en plus étudiées ». Et c’est pour quand, docteur ? « Dans un avenir pas très éloigné. » ». En bref, comment se passer, demain, des femmes puisque la reproduction même leur échappera…
Pour en revenir à la Chine et à l’Inde, elle aussi touchée par ce déséquilibre hommes-femmes, l’avenir se présente sous les couleurs d’une société « sans femmes », en particulier dans les campagnes : il n’est pas certain que cela soit une excellente chose et les frustrations risquent bien de déboucher sur de véritables crises, voire une explosion de la délinquance sexuelle et, surtout, sur ces fameuses migrations sexuelles que j’évoque comme l’une des formes en expansion des mobilités humaines… N’oublions pas que les pays touchés par le déséquilibre des sexes comptent, à eux seuls, plus d’un tiers de la population mondiale (environ 2,5 milliards de personnes).
En devenant une « ressource rare » (pardon pour ces termes que j’emprunte au vocabulaire économique, si frustre, et qui ne qualifie pas les femmes dans leur humanité propre), les femmes risquent de devenir un enjeu à la fois économique et géopolitique : une raison de guerre ? Si tel devait être le cas, cela nous ramènerait aux débuts de l’humanité, la technique atomique et les sciences en plus, avec les conséquences imaginables que cela peut entraîner… Il est temps de rappeler, haut et fort, contre les apprentis sorciers et la logique de Marché, que, selon l’adage chinois, « il faut un garçon et une fille pour que la paire soit complète », ce que notre civilisation, à travers sa propre littérature, a traduit en d’autres termes : « la femme est l’avenir de l’homme ». L’oublier, c’est condamner l’humanité toute entière et sortir de toute civilisation…
Bonjour monsieur, je sais pas si vous voyez qui je suis, je suis en seconde 10 au lycée Hoche. Je ne partage pas vraiment votre opinion politique mais j'adore votre façon de mener des réflexions, de tout remettre en questions mais surtout ce que j'aime chez vous c'est votre patriotisme !!! continuez comme ça et surtout ne changez pas. Merci d'être un prof digne de ce nom.
Rédigé par : Sébastien Dubois | 05 novembre 2007 à 18:36