Me voici revenu d’Andalousie après un séjour de quelques jours en cette Al-Andalous aux richesses culturelles multiples, de la Mezquita de Cordoue à l’Alhambra de Grenade, perché sur les hauteurs. Un voyage scolaire formidable avec des collègues motivés qui l’avaient préparé avec soin et passion, et des élèves curieux et, souvent, émerveillés par tant de beautés et d’Histoire concentrés en quelques lieux magiques : il y aura aussi un « après » par l’organisation d’une soirée autour de ce voyage, la présentation des photos et des récits qu’en auront faits les élèves eux-mêmes.
Ce qui m’a frappé dans les différents lieux visités dont je faisais la présentation historique et religieuse, c’est la succession de peuples, de cultures, voire de civilisations, différents qui, en définitive (mais l’Histoire ne s’arrête pas là…), ont fait de l’Andalousie ce qu’elle est, une sorte de superposition de formes et de styles et de « conservatoire » des traditions anciennes toujours actualisé, remis en cause ou conforté en certains de ses caractères selon les idées ou les enjeux du moment, par les « vainqueurs », Wisigoths, Maures ou Chrétiens de la Reconquista : ainsi, les mosquées ne sont pas détruites mais « christianisées », parfois fort maladroitement et peu esthétiquement (comme le reconnaît Charles Quint après la construction de la cathédrale au cœur de la Mezquita de Cordoue), mais il en reste la structure principale, comme si chaque religion ou civilisation qui succédait à la précédente s’en voulait, non l’héritière religieuse mais bien plutôt « l’aboutissement », l’achèvement de la grande quête spirituelle et civilisationnelle qui est aussi celle de la communauté nouvellement dépositaire du lieu… Cela ne s’est pas toujours fait de manière pacifique et la tolérance envers ceux qui pensent (ou prient) différemment n’a souvent été qu’un apaisement passager, « contractuel » mais toujours susceptible d’être remis en cause : l’histoire de la péninsule ibérique au Moyen-Âge n’est pas de tout repos…
Après les soubresauts d’un XXe siècle cruel pour l’Espagne et la « révolution tranquille » de la Monarchie espagnole incarnée depuis les années soixante par celui qui fut l’héritier du « caudillo » Franco puis « le roi », au sens le plus noble du terme, Juan Carlos 1er, il faut souhaiter que l’Histoire, sans s’arrêter pour autant (l’immobilisme n’est qu’une soumission au présent et la perte de maîtrise de son propre destin, de sa liberté), ne se rejoue pas sur le mode de la tragédie. Or l’Espagne, riche de son histoire, en est aussi parfois prisonnière quand la Mémoire devient un simple enjeu idéologique (et juridique…) et que les communautés se font communautarismes ou identitarismes, au risque de détricoter un ensemble national en oubliant que « toute vraie tradition est critique » selon l’heureuse formule de Maurras. Le fait que la famille royale soit, aujourd’hui, attaquée de la façon la plus vile par quelques séparatistes et grands hommes d’affaires dans une sorte d’alliance paradoxale (mais, somme toute, assez logique), peut inquiéter : vouloir détruire l’institution qui est le « trait d’union » par excellence entre les diversités espagnoles, c’est préparer l’éclatement d’un pays au plus grand bénéfice de quelques intérêts particuliers et au détriment de l’équilibre politique nécessaire à toute vie « démocratique », au sens que lui donne La Tour du Pin lorsqu’il évoque la « démocratie locale ». La vieille antienne monarchique « Sub rege, rei publicae » (Sous le roi, les libertés publiques) est d’ailleurs tout aussi valable pour notre voisin ibérique que pour notre propre nation…
Vous revenez de Cordoue quand on s'émeut ici d'une ouverture de sa mosquée à la "prière du vendredi". Article sur le site des Manants où l'on dénonce le "partage" de la cathédrale, sur celui du Café Bleu, et un fil de discussions ouvert sur le forum Vive Le Roi.
Votre avis sur le forum attendu avec impatience.
Merci.
Rédigé par : Kardaillac | 28 février 2008 à 09:57
L'histoire de l'Espagne, c'est aussi et surtout l'anarchisme, l'anarco-syndicalisme et l'autogestion de la production avant que les bouchers franquistes ne mettent leur chappe de plomb...
A bas tous les tyrans!
Rédigé par : Elmer | 28 février 2008 à 11:42
Ce voyage montre aussi le peu de courage venant à la fois des professeurs et des élèves. Les professeurs tout d'abord qui tapent sur 6 élèves, avec une punition d'apparat certes, mais en sachant pertinemment qu'au moins les 2/3 des élèves du voyage ont fauté : en effet, si seuls 6 élèves ont fauté, la responsabilité des professeurs en est réduite, puisque c'est un acte isolé.
Concernant les élèves, 4 ont été découverts, et 2 seulement, sur au moins 30 fautifs, ont assumé leur acte, en pensant que tout le monde se dénoncerait, pour que les 4 élèves ne soient pas des boucs émissaires, mais pour finalement obtenir 6 boucs émissaires.
Personnellement, la nature humaine me déçoit de plus en plus. Aucun n'élève n'a apparemment eu l'intelligence de comprendre qu'une faute de 30 personnes changeait toute la donne, mais non ils ont préféré sauver leur tête.
Quoi qu'il en soit, les professeurs, en infligeant seulement un blâme, permettent évidemment aux élèves de sans sortir sans égratignure, en expliquant le geste par des grandes phrases de confiance en l'élève, d'erreur passagère. Bref, tout le monde est content. Mais si au conseil de classe l'un de ces élèves se voyait refuser une récompense pour une conduite irresponsable pendant le voyage, je ne me laisserais pas faire.
Rédigé par : Zoubi | 28 février 2008 à 16:28
Pour Kardaillac: je vais aller sur le site vive le roy pour exposer mon avis.
Pour Elmer : l'histoire de l'Espagne ne se limite évidemment pas à l'anarchisme comme elle ne se limite pas à la dictature franquiste... Rappelons juste que c'est bien plus les communistes que les franquistes qui ont liquidé l'anarcho-syndicalisme et l'anarchisme en Espagne : cf les écrits de George Orwell sur ce sujet, écrits édifiants et qui expliquent la haine d'Orwell à l'égard des communistes après cette période qu'il a passé en Catalogne, dans les rangs anarchistes...
Pour Zoubi : soyons très clair : résumer ce voyage à UN incident mineur quand on voit le travail mené par l'équipe enseignante depuis plusieurs mois pour permettre la réalisation de ce voyage et la bonne réussite de celui-ci, me navre profondément; donc, pour moi, tout a été dit, et bien dit, par M. le proviseur adjoint. Ce blog est, comme vous le voyez, sans censure mais je regrette qu'une affaire, qui n'est pas à votre honneur et que nous avons réglé solidairement, resurgisse ici : que vous avanciez, en plus, votre crainte sur un impact possible sur une récompense en conseil de classe me fâche absolument et me scandalise. La confiance se mérite et se respecte, et la liberté s'assume, y compris dans ses erreurs ! Le simple fait que vous soyez obnubilé par une ridicule affaire de quelques minutes sur un voyage de six jours, et que vous craignez pour votre cas PERSONNEL ne m'incite pas forcément à la bienveillance...
Cet incident absolument MINEUR et que vous voulez absolument monter en épingle, comme pour vous justifier, n'est guère honorable et n'enlève rien à ma profonde satisfaction, à celle des collègues et de vos camarades (dont nous avons eu, encore aujourd'hui, de multiples témoignages, sans oublier aussi ceux des familles), de la réussite de ce voyage pour lequel nous avons donné du temps (combien de dizaines d'heures de préparation, de réunions, de négociations...), de l'argent (en fait, nous avons payé pour travailler ! puisque les profs payent désormais leur place alors qu'ils accompagnent, organisent, guident etc.), et que nous avons pris sur nos propres vacances (trois jours) pour ne pas trop faire perdre d'heures de cours aux élèves...
D'ailleurs, notre travail, et le vôtre, ne s'arrêtent pas là, puisqu'il y a la préparation de la soirée de présentation du voyage aux familles, soirée qui aura lieu dans quelques semaines, avec VOTRE présence. De plus, les quatre organisateurs du voyage commencent déjà à préparer celui de l'année prochaine, pour vos successeurs...
Dernière chose : les voyages scolaires sont en voie de disparition mais nous nous battons pour les maintenir et en faire de nouveaux : considérez bien que vous avez été un privilégié parmi votre génération, et ne l'oubliez pas, le reste (même si cela vous a été désagréable du fait de votre PROPRE attitude) n'a guère d'intérêt.
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 29 février 2008 à 01:00
Alors tout d'abord, je n'enlève absolument rien à la réussite du voyage, qui m'a particulièrement plu, je n'ai simplement pas abordé ce sujet dans mon message : ai-je une seule fois dit que le voyage était nul ? pourri par l'incident ? Non, on a vu de très belles choses, on s'est bien amusés tout en apprenant.
L'incident est mineur certes, mais la façon dont il a été traité, excuses pour avoir "entaché le voyage" à des personnes tout aussi fautives, j'ai trouvé cela humiliant. Si l'incident est mineur, l'équipe pédagogique (pour ne pas citer de nom) en a fait "tout un plat" : excuses, lettres, sanction, convocation des parents, mot sur "la feuille" ... pas étonnant qu'on réagisse au quart de tour.
Quoi qu'il en soit, je dois dire que j'ai posté sur le coup de la colère, et me rend compte aujourd'hui que c'était éxagéré. J'ai cependant envie (ou besoin ?) d'en discuter.
Tout d'abord, il a été abordé une sorte de contrat comme quoi la prise d'alcool était interdite. C'est évident, cependant je ne me souviens vraiment pas avoir entendu un membre de l'équipe organisatrice parler d'un tel contrat, nous laissant donc, à nous jeunes et insouciants élèves, une certaine marge que nous avons évidemment utilisée, vu la liberté grandissante au fil des jours. On ne refait pas le passé, mais une bonne petite mise au point ne sera pas superflue pour, je l'espère, les prochains voyages. J'espère que vous retiendrez qu'à 16-17 ans, on est comme les enfants de 5, on nous laisse de la liberté, on la prend et jusqu'au bout, c'est triste à dire mais, dans un groupe, le peu de maturité est vite submergé par l'envie de s'amuser. Dans notre société actuelle, la prise d'alcool devient pour les jeunes un moyen comme les autres de s'amuser, malgré les dangers (bon vous le savez surement déjà mais sa ne fait pas de mal de le redire).
Je m'excuse de m'être quelque peu emporté. Je me sentais frustré, trahi même. Il m'apparait aujourd'hui évident que je manquais de recul. Mon inquiétude vis à vis de la récompense s'explique, j'en suis bien désolé, par la pression perpétrée dans ce lycée, pression de réussite à tout prix, venant des profs puis déteignant sur les élèves.
Bon, ce voyage servira à tous, pour espérons les prochains. Encore une fois, je n'enlève en rien la réussite et la petite soirée me parait une très bonne idée.
Rédigé par : Zoubi | 29 février 2008 à 14:44
Pour Zoubi : votre commentaire ne me laisse pas indifférent, croyez-le. Je serai disponible à la rentrée pour en discuter de vive voix, si vous le souhaitez, bien sûr, seul ou avec vos camarades. A vous de me faire signe, si vous le souhaitez, là encore.
En tout cas, passez tout de même de bonnes vacances.
Cordialement.
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 29 février 2008 à 19:12
Une bien juste analyse de l'un des dilemme actuel de l'Espagne.
Merci Jean Philippe.
Un vieux compagnon de route rennais, maintenant résident permanent en Espagne et ce depuis quelques années...la prochaine fois que tu passes en Espagne il faudra me faire signe!
Rédigé par : Erwann | 02 mars 2008 à 08:37