Ce jeudi matin, pas un seul quotidien national dans mon kiosque préféré ! La cause : un mouvement de grève du syndicat du Livre CGT qui empêche la sortie et la diffusion des journaux papier. Ce n’est pas la première fois c’est toujours une fois de trop. Laurent Joffrin, de « Libération », évoquait sur France-Inter une véritable « prise d’otages » qui étrangle les journaux, déjà bien mal en point, et qui prive les citoyens d’informations et d’opinions sur les faits de la veille : en somme, une forme de censure qui ne dit pas son nom mais qui est bien réelle. Le syndicat du Livre CGT, désavoué par sa propre confédération, n’en a cure, malgré les appels à la raison : attitude irresponsable et inquiétante.
Dans le même temps, l’actuel président de la République, en rupture avec la tradition de la République fondée par de Gaulle, cherche à faire interdire la commercialisation d’une poupée vaudou le représentant (d’ailleurs de mauvais goût, il faut bien le dire), et s’entête après avoir été débouté hier mercredi par le tribunal en faisant appel : et, pourtant ! N’est-ce pas Nicolas Sarkozy qui disait « jadis » qu’il préférait « l’excès de caricature à l’excès de censure » ? L’attitude de Ségolène Royal, elle aussi transformée en poupée vaudou, semble plus convenable (et, surtout, plus politique) qui traite cette caricature par un simple haussement d’épaules.
Je suis toujours inquiet devant les censures, officielles ou non, même si certaines pourraient s’expliquer (mais devraient-elles être appliquées pour autant ?) pour des raisons de sécurité publique, pour éviter des affrontements violents entre groupes communautaires par exemple. Or, il est aussi des censures plus insidieuses et dangereuses encore dans notre République de plus en plus « émotionnelle », censures qui se parent des arguments de « respect » mais ne sont rien d’autres que des attitudes d’intolérance et d’irrespect des libertés d’opinion et d’expression. Certains groupes s’arrogent ainsi le droit de « censurer » ce qui « porterait atteinte à leur dignité », par le recours systématique aux tribunaux, au risque de transformer notre pays en « République des juges », étouffante et liberticide. D’autres censures sont même initiées par certaines municipalités, par le dépôt de plaintes en fait abusives, pour écarter les oppositions politiques, comme j’en ai été moi-même la victime en 2002, aux Mureaux…
Pour répondre à ces censures, il y a la formule de Maurice Clavel, écrivain catholique qui puisait aux sources gauchiste comme royaliste dans les années 70, et qu’il avait lancée en quittant le plateau d’une émission de télé : « Messieurs les censeurs, bonsoir ! ». Ce que je traduis aussi par ma devise personnelle : « la liberté, ça ne se renifle pas, ça se respire ! ». Et ça sent bon aussi l’encre d’imprimerie…