Je suis de correction au baccalauréat cette année et je suis allé retirer mes copies vendredi au lycée Mansart de Saint-Cyr-l’école dans lequel j’ai enseigné un an, lors de mon arrivée dans la région parisienne, en 1992-93. J’ai appris que j’étais nommé coordinateur d’un jury d’histoire pour la filière S pour cette session : cela peut sembler étrange quand l’on sait que je n’ai jamais eu de classes de Terminale S de toute ma carrière, y compris cette année
Bizarrerie administrative, sans doute
Cette responsabilité nouvelle et inattendue m’a valu de recevoir, inscrites sur une feuille dont le côté « Confidentiel » est souligné par les caractères énormes de ce terme sur les papiers remis, des consignes qui valent leur pesant d’hypocrisie et de malhonnêteté, il faut bien le dire, dans la partie qui concerne l’ « harmonisation de la notation » :
« - La moyenne au baccalauréat est de 10. Il est donc hautement souhaitable que celle de l’épreuve d’histoire et géographie se situe au moins à ce niveau afin que nos disciplines ne soient pas de celles qui pénalisent les candidats.
- La notation doit prendre en compte prioritairement les aspects positifs de la copie et non être le résultat de la recension des manques. »
En somme, il ne faut pas que les notes d’histoire puissent « désespérer l’inspection, les élèves et leurs parents » et entraîner l’échec de quelques candidats ou baisser leur moyenne, ce qui nous a été confirmé par la venue, dans notre jury, d’un Inspecteur (un IPR, selon la formulation administrative de l’éducation nationale) qui nous a bien précisé notre rôle et nous a rappelé implicitement, en résumé, que le bac ne devait pas avoir de caractère sélectif en tant que tel
Le bac, nouveau « droit de l’homme »
Dans ces conditions, je pose la question : dans ces conditions particulières, à quoi sert le bac ?
Question subsidiaire : pourquoi continue-t-on à le maintenir alors que l’esprit semble aujourd’hui de n’en faire que la reconnaissance d’une fin d’études secondaires, et qu’il s’agit de le donner à plus de monde possible, sans être trop regardant sur les connaissances et aptitudes nécessaires pour l’obtenir ? Dans ce cas, pourquoi ne pas trouver une autre procédure mieux adaptée à cet état de fait et moins coûteuse, moins « lourde » aussi.
En fait, les sujets étaient, d’ailleurs, et je le tiens autant de mes anciens élèves que de mes collègues, d’une grande banalité et, souvent, facilité : c’est le cas en Histoire-Géographie et, ainsi, mes quelques copies déjà corrigées dépassent généralement 12
Ce qui m’inquiète dans les consignes « confidentielles » données par l’Education nationale, c’est leur démagogie et le fait qu’elles sont tout à fait oublieuses de ce que devrait être le rôle de l’Instruction publique : élever, au sens intellectuel du terme, les jeunes qui lui sont confiés, pour leur permettre, non seulement de trouver des débouchés professionnels, mais aussi d’affronter les « éléments du monde » en ouvrant et épanouissant leur réflexion et en leur donnant un bagage culturel, non seulement utile mais aussi « inutile » au sens matériel du terme, c’est-à-dire pouvant leur donner d’autres satisfactions que celles purement professionnelles ou matérielles
Un point rassurant, néanmoins : la plupart des collègues haussent les épaules au regard de ces consignes « éduc’nat » et corrigeront en leur âme et conscience, non en fonction des consignes précitées, mais en fonction des connaissances et des réflexions mises en uvre par les élèves.
Pour ceux que j’ai eu l’honneur de compter dans mes classes ces dernières années, j’ai grande confiance et je sais que le bac n’est, pour eux, qu’une étape vers d’autres aventures et qu’ils n’en font pas un « absolu »
J’en profite pour leur dire que je ne les oublie pas et que mes pensées iront vers eux le jour des résultats : je serai présent au lycée et ses environs pour les féliciter, j’espère, de leurs bons résultats.
Je ne comprends pas l'intérêt de décrêter de tels principes. Les effets sont très néfastes et la première année d'étude supérieur va massacrer et désorienter (pédagogiquement) tous ces élèves qui bénéficie de ses artifices.
J'ai 27 ans et je trouve que l'éducation nationale est une des institutions dont on devrait avoir le plus honte en France. C'est une machine à bachotage permanent qui n'oriente absolument pas les élèves là où il faudrait. Je le perçois comme un lamentable mammouth. Comme ça c'est dit.
Rédigé par : Guillaume | 16 juin 2007 à 21:10
Bah,
le bac ne sert à rien. On s'en fiche de savoir si ceux qui l'ont le mérite ou pas. C'est après le bac qu'on voit les aptitudes réelles, que ce soit à l'université ou au travail.
Rédigé par : shannonriver | 16 juin 2007 à 21:28
En effet le VAC ne serta plus a rien, c'est plus un cadeau de fin de lycée qu'autre chose.
Maintenant qu'on a supprimé cette "epreuve" au vrai sens du terme, on retrouve ces "épreuves" plus loin, en 1 année de medecine, en prépas ou ds les LMD en fac droit etc...
Bref, on n'a fait que repousser d'un an ou 2, ces examens d'entrée, alors Vive l'Education Nationale!
Rédigé par : TL 1°S4 | 17 juin 2007 à 12:19
Bravo J.P Chauvin pour ce témoignage rocambolesque.^^
Personnellement je passe le bac et j'espère avoir de bons résultats, si j'en ai de mauvais je saurai que je suis une "sous-merde" vu votre témoignage. Donc j'espère de tout coeur avoir de bonnes notes pour pouvoir poursuivre mes études.
Je suis d'accord avec shannonriver, c'est après le bac que l'on voit les aptitudes de l'élève donc on ne va pas pleurer sur ce bac.
Rédigé par : Frédo | 17 juin 2007 à 17:04
p.s : j'aurai aimé vous avoir comme professeur !
Rédigé par : frédo | 17 juin 2007 à 17:15
Correcteur il ya plus de vingt ans, j'avais aussi ce genre de consigne sur la forme, mais sur le fonds, on avait une notation plus générale, autorisée au delà de la matière corrigée.
A ce propos, on dit plutôt coordonnateur, coordinateur étant un néologisme ambiant (l'ordinateur n'est pas loin) certes entré dans les moeurs et dans certains dictionnaires,usage faisant loi, mais aussi mal venu que rédhibitoire (Voir ce mot)
peut l'être...Amicalement.
Rédigé par : Yvan le Terrible | 18 juin 2007 à 13:19
Pour Yvan le terrible:
effectivement, malgré les consignes données, chacun fait ce qu'il veut, à part quelques collègues craignant les foudres de l'Inspection... et c'est tant mieux. De toute façon, les sujets donnés cette année n'avaient rien de vraiment sélectif, sauf exceptions et les copies que je viens de corriger confirment que la moyenne dans le lycée où je corrige sera sans doute élevée, au dessus de la "moyenne". Cela dépend évidemment des lycées d'où viennent les candidats.
Quant au terme de "coordinateur", c'est le terme qui a été inscrit sur le dossier qui m'a été remis: mais je ne méconnais pas que le terme correct serait plutôt "coordonnateur"...
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 18 juin 2007 à 19:19
En effet, ce sont la des consignes terribles; on est bien loin de la république de Ferry.. et c'est bien décevant. Sinon, j'en profite pour passer un "coup de gueule" (permettez moi l'expression) contre la censure imposée par l'éducation nationale au blog http://hoche.blogspot.com . De telles mesures vont à l'encontre de la liberté d'expression rpublicaine; de même son auteur principale va sûrement être confronté au conseil de discipline, pour un acte relativement anodin (on ne peut nier que la chose était faite avec plus d'humour, même d'amour pour ce lycée, et non pas avec la volonté d'atteindre à la réputation de l'établissement. Vraiment je suis décu... Merci à votre soutien tout au long de l'année tout de même!
Rédigé par : L'élève anonyme | 20 juin 2007 à 20:32
L'Ecole républicaine n'a jamais été très tolérante, et je suis bien placé pour le savoir, en ayant été parfois, en tant qu'élève mais aussi en tant que prof, la victime...
Je trouve fort dommage que votre blog soit censuré, et je le ferai savoir, soyez-en sûr.
"La liberté ne se renifle pas, elle se respire": c'est ma devise, comme vous le savez... Continuez à écrire, à moquer, à ironiser, parfois à déplaire aussi... Bon courage !
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 21 juin 2007 à 01:12
Censure? Conseil de discipline?
Mais pourquoi? Je n'ai été informé de rien.
Laffiche ou encore un autre glorieux fait d'arme? :-D
Si c'est l'affiche qui cause tous ces ennuis, je veux bien prendre étant donné que je suis responsable...
Enfin, le conseil de discipline, j'avoue être un peu jaloux!
Bon courage, Tosk.
PS:on se voit l'année prochaine, je reste en ecs :-)
Rédigé par : Pentagramme | 21 juin 2007 à 09:44
... et moi qui était fière de mon 20 au bac en hist/géo ! :(
Rédigé par : Loo | 21 juin 2007 à 09:47
"cela dépend évidemment des lycées d'où viennent les candidats", je sais pas si j'ai bien compris la phrase, enfin cela ne me paraît pas si évident que cela.
Rédigé par : judy | 24 juin 2007 à 11:43
Bravo pr ce texte Mr, c'est la 1ere fois que je venais sur ce blog et je dois avouée qu'il est fort intérressant. Il est incroyable et désolant que de telles consignes soient données. Autant, il est vrai que l'on est content lorsque l'on a une bonne note, autant il faut qu'elle soit le plus juste possible. Si se n'est pas une note méritée alors tout ca ne sert à rien. Le BAC ne devrait même plus être passé. Il n'a plus aucunes valeurs.
J'ai par ailleurs eu un professeur de Maths (particulier) qui me fesait des lecons de ya plusieurs années. Je dois quand même reconnaitre que le niveau a fortemant diminué. Des choses que l'on fesait en 2nde il y a 30 ans, on les fait maintenant en Math SUP/ Maths SPé.
C'est affligeant, voir outrant.
Cordialement.
Rédigé par : Yaya | 28 juin 2007 à 18:03
Utile épreuve qu'est le baccalauréat. Plus question de parler de niveau... Permettez-moi de dire cette horreur, mais en continuant ainsi, de nouveaux gisements de pétrole vont être découverts.
De plus, certains professeurs préfère rester dans le cadre du programme. Une question d'un élève curieux ; réponse : "ah, je ne te réponds pas en fait parce que c'est pas au programme mais bon hein, j'ai pas envie de t'embrouiller". Certains pourraient l'interpréter ainsi : "je n'ai pas envie de t'embrouiller parce que je vais raconter n'importe quoi, donc c'est moi qui ne sais pas". Et pourtant, ces professeurs-ci affirment qu'ils sont plus instruits sur un sujet que d'autres personnes alors que ces dernières ont fait une thèse à ce propos. Enfin... Chacun sa fierté.
Donc, le lycée peut se résumer à "je vous forme pour le bac et puis zut, je ne vais pas plus loin, débrouillez-vous". Vision très instructive et très intéressante. Or, fort heureusement, nous avons eu, pour notre part, la chance d'avoir des professeurs qui n'appliquent pas cette règle que nous pourrions qualifier de déplorable (un élève est naturellement avide de connaissances...oui oui !!!...enfin...) - y compris vous ; un grand merci. Vous n'êtes pas le seul mais les professeurs que j'évoque sont rares, ils sont perdus au milieu des multiples "non c'est pas au programme", "tu vas t'embrouiller", "débrouille-toi", "je ne sais pas je m'en moque" et autres "pourquoi tu poses cette question ? tu te crois malin hein ?".
Pour finir, une petite réaction pour notre élève anonyme :
A HOCHE, on aime le politiquement correct ; à HOCHE, on n'aime pas que les élèves donnent leur avis sur les locaux ... (gare à l'estomac !!!), à HOCHE, on aime la propagande, l' "honneur redoutable". A HOCHE, on n'aime pas que les élèves fassent des blogs, même avec beaucoup d'humour. Pourquoi ? Parce que ces blogs disent la vérité, souvent. Ca ne plaît pas. La réputation est à tenir, or le reste ne suit pas. On préfère encore les tournages de films de strip-teases dans le bâtiment des sciences (c'est moins grave, selon le lycée). On préfère louer une Dédibox à 29,99/mois au lieu de financer le FSE. Bref. Merci à l'Académie également. Un grand merci, du fond du coeur. Merci pour les procédures et l'appel téléphonique surprise. Monsieur, supprimez ce message si je suis "hors la loi" en exprimant ces "pensées". Il ne s'agit pas de liberté ici mais de diffamation, de propos infondés. Je suis minable. Si si, je vous l'assure.
Rédigé par : Sixte P.a.a. | 22 août 2007 à 22:43
Pour Sixte P.a.a.:
N'étant pas chez moi, je ne peux pas vous répondre "in extenso" mais je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dîtes, en particulier sur l'affaire des blogs: vous savez (je l'ai fait aussi savoir.. ce qui m'a aussi valu quelques "surprises"...) combien j'ai regretté la disparition de certain blog qui évoquait avec un humour parfois grinçant les "gaités du lycée Hoche". Mais, ne l'oubliez pas : la liberté, ça ne se renifle pas, ça se respire.. Je suis persuadé que d'autres blogs fleuriront...
A bientôt pour une réponse plus complète.
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 23 août 2007 à 11:45
(Pardonnez-moi pour la petite coquille au deuxième paragraphe.)
Oui, l'humour était grinçant, hélas, il l'était trop. C'est un lycée qui fleure bon la prétention. Oui, d'autres blogs fleuriront...
Rédigé par : Sixte P.a.a. | 02 septembre 2007 à 10:34
thanks share!
Rédigé par : wow gold | 08 octobre 2007 à 19:10