Tony Blair vient de quitter le pouvoir la semaine dernière après une décennie de gouvernement : il laisse la place à Gordon Brown qui poursuivra sans doute la même politique à quelques inflexions près, sans doute plus eurosceptique que son prédécesseur et moins charismatique.
Mais, à l’occasion du départ de M. Blair, le quotidien « Le Monde » a consacré un long article (dimanche 24- lundi 25 juin 2007) sur les relations entre l’ancien premier ministre et la reine Elisabeth II, article qui a le mérite de montrer toute l’utilité d’une Monarchie, fut-elle discrète ou « passive » comme on pourrait la qualifier au premier abord en évoquant celle du Royaume-Uni : « Avec Tony Blair comme avec ses prédécesseurs, la souveraine est restée toujours fidèle à la définition de ses pouvoirs tels que les a répertoriés un journaliste du XIXe siècle, Walter Bagehot, dans une maxime passée à la postérité, « formuler des avertissements, donner des encouragements et des conseils ». En cinquante-cinq ans de règne, la reine a toujours scrupuleusement veillé à ne pas s’ingérer dans les affaires du gouvernement (
). De surcroît, rien n’a jamais filtré du tête-à-tête hebdomadaire entre le chef de l’Etat et les locataires du 10 Downing Street. Aucun procès-verbal n’est d’ailleurs rédigé à l’issue de cette rencontre.
« La reine n’est ni de gauche ni de droite. Elle met tous les politiciens dans le même sac. » Du témoignage d’Edward Fox, conseiller à Buckingham entre 1952 et 1967, se dessine le profil d’une monarque de sensibilité centriste, pragmatique, préférant le consensus à la polarisation. (
)
L’un des conseillers les plus écoutés du premier ministre sortant, Alastair Campbell, a révélé l’importance qu’avait pour le premier ministre son rendez-vous hebdomadaire avec la monarque : « C’est en effet la seule personne dont il est sûr qu’elle ne livrera aucun secret à la presse. » M. Blair n’a jamais rien confié à son entourage de ses conversations au Palais. Tout juste sait-on que lorsque, en 1999, le premier ministre évoqua avec la souveraine l’organisation « du » Jubilé royal de 2002, cette dernière lui rétorqua sur un ton pincé : « C’est mon Jubilé, monsieur Blair. » »
Ces extraits montrent bien que, même que dans la Monarchie britannique, plus symbolique que politique, le fait de n’être pas choisi par l’élection mais d’être chargé de la magistrature suprême de l’Etat par le simple fait, le plus simple et naturel qui soit, de la naissance, de cette venue au monde dans laquelle n’intervient ni les puissances d’argent ni les jeux politiciens et qui donne des devoirs au jour même de celle-ci au futur souverain, permet une véritable indépendance du faîte de l’Etat qui permet d’incarner, au-delà de toutes les différences (politiques, sociales ou communautaires), le Pays et son Histoire comme son Destin. Il n’est pas impossible de penser que, dans le cadre français et avec une pratique différente (la « Monarchie active » telle que l’évoquaient, chacun à leur manière, Maurras et feu le Comte de Paris), cette indépendance statutaire et « naturelle » pourrait jouer un rôle qui ne serait pas que d’influence mais aussi d’action politique : notre pays ne s’en porterait pas plus mal, me semble-t-il, et cela nous épargnerait cette impression de « présidentielle permanente » que donne le débat politique en France, surtout depuis l’introduction du quinquennat
Les constitutionalistes français, cest-à-dire tout un chacun en pays gaulois, débinent la monarchie anglaise au motif des faibles pouvoirs exercés. Cest le leurre de notre latinité.
En pays de coutume, linfluence par lascendant est ressentie plus fortement que chez nous où le dogme de légalitarisme fait rage - , et je crois tout à fait que le souverain anglais exerce son droit de remontrance, son devoir de conseil et aussi ses encouragements, chaque semaine que Dieu fait.
De quelquun dimmuable, qui regarde passer les trains politiques, ça a du poids, si le titulaire dispose bien sûr des qualités humaines que réclame sa charge.
Son impartialité constitutionnelle ne doit pas être traduite en impotence politique. Mais cest dur à instiller dans les esprits français captivés par laffrontement quotidien des partis jusquau plus haut sommet de lEtat.
Rédigé par : Catoneo | 05 juillet 2007 à 17:46
Un billet de Royal-Artillerie "Changing the Guard" en disait un peu plus sur les "rois du nord" dont l'influence est mal perçue chez nous.
http://royalartillerie.blogspot.com/2007/02/changing-guard.html
Rédigé par : Catoneo | 05 juillet 2007 à 19:42