Quand il était jeune, François Léotard vendait « Aspects de la France » à la criée, et son frère Philippe, acteur grande gueule, ne cessa jusqu’à sa mort de revendiquer un royalisme non-conformiste et sans doute un peu plus provocateur que politique. Le temps a passé et, après moult expériences ministérielles et déceptions politiques, François Léotard a pris sa retraite officielle de la vie électorale, parée d’une image de libéral européen mélancolique. Si nombre de ses engagements « républicains » n’ont pas été et ne seront jamais des nôtres, cela n’empêche pas d’écouter ce que l’homme, le citoyen qu’est François Léotard, peut avoir à dire. Ainsi, la semaine passée, à l’occasion de la sortie de son livre très critique à l’égard de l’actuel président en exercice (« ça va mal finir »), j’ai saisi quelques paroles fortes qu’il prononçait sur une chaîne de radio généraliste et qui m’ont parues fort intéressantes : il expliquait qu’à force de jouer sur les apparences et de s’afficher comme une sorte de « nouveau riche », M. Sarkozy risquait, en même temps que les patrons revendiquant des salaires hors de mesure, de ranimer une véritable « lutte des classes » qui ne pourrait être que préjudiciable à l’équilibre social et pourrait ranimer de vieux démons et des violences difficiles à juguler.
Il me semble bien que M. Léotard a raison et je sens, dans certains propos de comptoirs (« le parlement du peuple » selon Balzac) et dans les rumeurs de la rue (mais aussi celles de la salle des profs), que la colère monte avec des arguments qui tiennent souvent plus du sentiment que de la raison. La question du pouvoir d’achat y est sans doute pour beaucoup, mais pas autant que l’impression que le Pouvoir est aux mains des « riches » (sic), que l’argent coule à flot dans les palais de la République tandis que les Français moyens ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. « L’impression » est-elle toujours confirmée par les faits ? Ce n’est pas exactement certain mais l’impression compte plus, en définitive, dans la formation de « l’opinion du moment » que les réalités, tout comme la rumeur dont on connaît la force parfois dévastatrice au fil de l’Histoire. Aussi, M. Léotard voit-il juste lorsqu’il met en garde le Pouvoir en place contre les périls qu’une certaine attitude indécente et trop marquée par la « pipolisation », par la morgue des « nouveaux féodaux », fait courir à notre pays et à sa tranquillité.
Pour le royaliste que je suis, si je vois dans cette situation la confirmation de la nature essentielle de la République née des « envies bourgeoises » de l’époque des Lumières et de la Révolution, je ne m’en félicite pas : mais le meilleur moyen d’éviter cette désagréable situation, c’est encore de « dépasser la République », de la remplacer par un régime qui ne soit pas le résultat des jeux d’argent, fut-il « électoral », mais qui en soit, par nature même, indépendant parce qu’extérieur à ceux-ci. « La naissance ne s’achète pas », c’est encore l’un des meilleurs arguments pour la Monarchie à transmission héréditaire…
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