Comment faire comprendre à nos concitoyens la nécessité de renoncer à ce qui, aujourd’hui, leur paraît comme un droit inaliénable de l’électeur, à cette élection présidentielle voulue par le général de Gaulle comme une forme de sacre populaire et la légitimation de la politique, de la présence même de l’élu au faîte de l’Etat ? Et pourtant ! Cette élection a perdu beaucoup de son aura ces dernières années auprès d’une part croissante des électeurs, et la dernière, celle de 2007, a laissé un certain goût de cendres dans la bouche, autant chez ceux de Ségolène Royal que de Nicolas Sarkozy… D’ailleurs, le choix était-il si clair que cela, dans les raisons mêmes des votes de chacun ? Et puis, qui, en définitive, choisit les candidats de cette présidentielle ? La sélection partisane préalable n’est-elle pas une limitation de ce droit d’élire le Chef de l’Etat sans a priori ? Mais ces remarques faites, il faut bien reconnaître que ce jeu électoral présidentiel apparaît aussi comme une forme de respiration politique dont les Français ressentent le besoin : c’est pourtant l’asphyxie qui menace !
Car cette élection présidentielle ne garantit ni l’indépendance ni même, en ces heures de dépréciation de l’autorité, la reconnaissance de la fonction arbitrale et décisionnelle de la magistrature suprême de l’Etat : élection donc imparfaite pour permettre au détenteur de la plus haute fonction de l’Etat de parler et d’agir selon l’intérêt commun… Que l’on ne s’étonne pas, donc, de la dérive qualifiée d’autoritaire par certains (un Pouvoir autoritaire n’est-il pas la preuve que l’autorité de ce Pouvoir-là n’est pas respectée « naturellement ? ») de la République actuelle : « En fait, le pouvoir sarkozyste apparaît à l’usage comme une perversion de l’Etat fort. En quelques mois, Nicolas Sarkozy a établi un système de pouvoir personnel et clanique dont la République n’offre pas d’autres exemples. Le premier ministre est réduit à un rôle de comparse ; les ministres sont ravalés au rang de simples exécutants de la volonté du Président. (…) Après cela, l’intention affichée de redorer le blason des Assemblées paraît une provocation. Péguy aurait parlé d’une « opération de feintise ». Ce pouvoir a pour autre vice d’être clanique. (…) Nous sommes entrés dans un système de cour dans lequel le prince distribue et retire les faveurs. » (Jean-Paul Bled, in « Les cahiers de l’indépendance », janvier 2009). Ainsi, la République présidentielle mène-t-elle l’Etat au discrédit et le Politique à la défaveur près de nos concitoyens, au risque d’entraîner une contestation de ces deux piliers nécessaires à toute société humaine ordonnée, une contestation qui peut, si l’on n’y prend garde, « se tromper de colère » et affaiblir notre pays.
Face à ses aboutissements logiques et malheureux du principe électif appliqué à la désignation du Chef de l’Etat, la succession héréditaire au sein d’une famille n’apparaît pas forcément à nos concitoyens comme une réponse facile ni même immédiatement compréhensible : et pourtant, c’est celle-ci qui donne le plus de possibilités et de potentialités au regard de l’intérêt général et politique du pays…
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