Cela fait déjà plusieurs mois que j'évoque la volonté allemande d'imposer le relèvement de l'âge légal du départ à la retraite à 67 ans pour tous les pays de l'Union européenne, suite aux déclarations des députés et ministres allemands relayées par la presse économique, fort discrètement en France, plus bruyamment outre-Rhin, dès le mois de janvier dernier. Nous avons même, quelques amis du Groupe d'Action Royaliste et moi-même, organisé le samedi 5 février à Paris la première protestation de rue contre cette réforme annoncée, dans une indifférence quasi-générale : les personnes que nous croisions et à qui nous distribuions notre tract dénonçant ce projet n'y croyaient pas, haussant les épaules à ce qui paraissait si improbable alors ! Et pourtant !
Le jeudi 22 septembre, le premier ministre François Fillon, sans doute encouragé par l'absence de réactions syndicales l'hiver dernier devant ce que prônait officiellement l'Allemagne au nom de la sauvegarde de la monnaie unique, a ouvertement abordé le sujet, sans beaucoup de précautions oratoires : là encore, c'est au nom de la construction européenne et du « développement » de la zone euro qu'est prôné cet alignement sur la norme allemande (baptisé « convergence progressive de l’organisation économique et sociale » par M. Fillon), mais aussi espagnole désormais, et avec l'argument d'une égalité de traitement pour tous les salariés d'Europe, égalité qui ne va pas, néanmoins, jusqu'à demander une égalité de « traitements », c'est-à-dire de salaires selon les fonctions entre tous les Européens...
Le premier ministre M. Fillon sait qu'il joue sur du velours : les syndicats sont atones, et ne se sont guère remis de leur défaite de l'automne 2010 ; la crise de la dette donne les coudées franches aux États, à l'égard des fonctionnaires et des salariés, et aux institutions européennes, pressées d'en finir avec les derniers obstacles sociaux au jeu du libre marché et d'imposer une « gouvernance européenne » dont le contrôle échapperait complètement aux États comme aux peuples ; le sauvetage de la monnaie unique justifie tous les plans de rigueur (qu'il conviendrait de nommer plutôt « austérité », ce qui n'est pas tout-à-fait la même chose...), sans qu'il soit possible de discuter ni de proposer autre chose que cette logique économique et sociale dure aux plus faibles mais aussi aux classes moyennes en voie de paupérisation ; l'Allemagne ne cache plus sa volonté de diriger l'Europe et de lui imposer ses règles, au prétexte d'une « efficacité » plus grande dans la maîtrise des coûts salariaux et de la dette publique...
Néanmoins, ce relèvement annoncé de l'âge de la retraite n'est pas acceptable alors que l'on parle à nouveau de « recapitaliser les banques », opération qui ne peut se faire qu'avec de l'argent public, celui des États et des contribuables qui y participent, ce même argent qui se fait plus rare pour les salariés et les retraités, en France comme dans de nombreux pays d'Union européenne... Il serait juste et bon que ce ne soit pas toujours les mêmes qui soient appelés à faire les plus grands sacrifices quand les plus aisés s'abstiennent de remplir leurs devoirs fiscaux, et là aussi, la remarque vaut pour la France comme pour certains de nos partenaires de l'Union européenne : il n'y a, à terme, pas d'ordre social possible et durable sans véritable justice sociale !
Alors, une fois de plus, non, cent fois, mille fois non à cette retraite à 67 ans qui marque la fuite en avant d'un système en plein désordre et incapable de reprendre la main face aux marchés et aux financiers !
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