Suis-je un nostalgique, un adorateur de temps anciens ou d’un régime monarchique qui aurait épuisé toute sa sève historique et politique avant le XIXe siècle pour céder la place à une République plus en phase avec les révolutions industrielles et la société de consommation ? C’est, en tout cas, un reproche que j’entends souvent dans la bouche de personnes qui, d’ailleurs, ne sont pas forcément malveillantes à mon égard ou aux idées royalistes.
En fait, si je suis, et (j’élargis l’affirmation à mes amis d’idées et de militantisme) si nous sommes royalistes, ce n’est pas pour regarder passer le train de l’histoire en nous réjouissant d’avoir eu et d’avoir encore raison sur le diagnostic, et pour nous contenter de cette certitude rassurante et, en définitive, stérile. Il nous semble important de réfléchir aux conditions institutionnelles d’un équilibre social dans notre pays et de la justice sociale sans laquelle l’économie n’est qu’une terrible loi de la jungle dont les travailleurs sont les principales victimes. Cette réflexion ne doit pas oublier les réalités de la mondialisation, non pour s’en contenter ou seulement s’y adapter, mais pour les dépasser et créer d’autres rapports de force, favorables à la fois au Politique et aux Etats, et aux sociétés et communautés professionnelles : il ne s’agit pas de nier les réalités présentes mais de fonder et faire prospérer d’autres réalités destinées à remplacer celles qui, aujourd’hui, font preuve de leur malfaisance sociale.
Ce qui manque à l’Etat aujourd’hui pour s’imposer à la mondialisation, nouvelle forme de la féodalité économique, c’est le temps, l’indépendance et la capacité de décision et de mise en pratique de cette dernière.
Coincée entre deux élections, la République oscille entre démagogie et déni : la Monarchie (et nous parlons de la Monarchie active et politique « à la française » et non d’autres modèles monarchiques étrangers), elle, inverse la problématique et fait du temps un allié parce qu’elle peut, non le dominer, mais le maîtriser ou, mieux, l’accompagner pour mieux le guider. Cet avantage certain, lié au mode de transmission héréditaire et à la possible longueur du mandat royal, permet d’envisager la mise en place de véritables politiques, en particulier sociales, et d’avoir à la tête de l’Etat un magistrat suprême garant de ces politiques. Un magistrat qui joue son rôle d’arbitre et peut, le cas échéant et dans le cadre de la Monarchie active que nous prônons, engager sa parole au sein des instances internationales qui « réglementent » les échanges et les politiques économiques et commerciaux. Cette magistrature royale est un moyen de rendre sa visibilité au pays au-delà des seules échéances électorales et gouvernementales, et de rendre à l’Etat son visage et sa présence éminemment politiques. Le Roi n’est pas un économiste ou un expert, il n’est pas non plus un « syndic du capitalisme », et ce qu’il incarne, au-delà de sa propre personne physique, peut donner une plus grande force à la parole de la France. Face à la cryptocratie des grandes féodalités financières, à cette « fortune anonyme et vagabonde » qui rêve d’une gouvernance sans politique et en particulier sans politique sociale, il est un visage, il est un Etat, il est le politique, celui qui ne compte pas seulement en millions d’euros mais qui pense en termes de personnes et de communautés, en intérêts humains et non en simples taux. La Monarchie française est, par essence, profondément sociale (ce qui, jadis, lui a d’ailleurs coûté cher…) car elle a ce devoir d’humanité sociale dont la Finance, celle que dénonçait jadis un certain candidat François Hollande, semble s’affranchir pour mieux satisfaire ses « clients »…
(à suivre)
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