La Monarchie française est éminemment sociale, ou a le devoir impérieux de l’être, ne serait-ce que pour légitimer sa nécessité et son autorité : c’est un élément que je ne cesse de mettre en avant, suscitant parfois une certaine circonspection de la part de mes contradicteurs mais aussi parfois des sympathisants monarchistes eux-mêmes…
Sans doute faut-il expliquer ce point de vue, et l’approfondir sans cesse, au regard de l’actualité, malheureusement cruelle aujourd’hui envers ceux qui travaillent ou qui cherchent un emploi : si la Monarchie n’est pas un remède miracle, elle est le régime qui peut permettre, avant tout, de garantir la justice sociale et de ne pas abandonner ceux qui souffrent d’une crise (en fait, d’un processus de mondialisation…) dont ils ne sont guère, en tant que tels, responsables !
L’indépendance de l’institution royale, de par le fait que la naissance ne doit rien à la fortune, lui donne l’occasion (qui est, en fait, un devoir) de parler au-dessus des simples intérêts privés, y compris des plus riches, que ceux-ci soient des individus ou des sociétés privées. Un Louis XIV n’hésita pas, en son temps, à embastiller Nicolas Fouquet, l’homme le plus riche du royaume, sans doute plus comme un rappel que l’Argent ne faisait pas le bonheur et, en tout cas, ne commandait pas à l’Etat royal en France, que comme le règlement d’une simple affaire de corruption…
De plus, le Roi n’est pas le représentant des classes dominantes (une sorte de suzerain capitaliste, en somme) mais un souverain qui s’impose à tous et encore plus à ceux qui possèdent, et qui a le devoir de n’oublier personne dans son souci politique. S’imposer ne veut pas dire être un dictateur qui terroriserait les riches et flatterait les autres, mais simplement rappeler à tous que l’Etat n’est pas « une place à prendre » mais un pays à servir, au-delà des différences et des libertés particulières qu’il faut organiser, ou plutôt laisser s’organiser dans le respect des équilibres sociaux et de la justice nécessaire à toute œuvre sociale. Dans un monde où l’Argent a pris une telle importance, cela ne sera sans doute pas facile mais la Monarchie a ainsi quelques atouts et il serait dommage pour le pays de ne pas les utiliser… L’indépendance royale, certes menacée par les jeux des groupes de pression financiers dans cette mondialisation qui cherchera à fragiliser l’Etat politique, est un levier important dans la capacité de l’Etat et de son gouvernement, quelle qu’en soit la couleur électorale, à faire accepter les réformes à ceux qui, d’ordinaire, cherchent à s’en abstraire ou à en fuir les conséquences quand elles ne leur conviennent pas. Mais la Monarchie n’oublie pas de permettre à tous, y compris les groupes de pression, de s’exprimer et de proposer, voire de contester : mais c’est la Monarchie qui arbitre et préserve l’Etat et l’intérêt commun, tout en laissant le gouvernement faire son travail et œuvrer au quotidien.
La Monarchie active « à la française », de par son rôle majeur (sans être omnipotent ni même omniprésent) d’arbitrage politique et de protecteur social, marque son territoire d’action par sa capacité de décision dans quelques grands domaines, ceux que l’on nomme régaliens (ce qui, d’ailleurs et même en République, veut dire … « royaux » !) : la grande finance, la diplomatie et les affaires militaires, et la garantie de « la protection de tous », en particulier sociale.
Si la Monarchie instaurée (le plus tôt sera le mieux !) veut s’enraciner sans se renier, il lui faudra assurer et assumer son rôle éminemment social : dans un monde incertain, face à une mondialisation menaçante, elle doit tracer un sillon social profond en rappelant aux puissants d’aujourd’hui, d’ici comme d’ailleurs, que toute politique crédible et efficace passe par la prise en compte des populations et par le souci de préserver la justice sociale, ciment des sociétés et facteur d’unité nationale. Il lui faudra aussi lancer le grand chantier d’une nouvelle organisation sociale, par le biais d’un syndicalisme vertical qui prenne en compte, dans ses structures, tous les échelons de la hiérarchie, et par la mise en place d’espaces de réflexion et de décision, voire de redistribution dans certains cas (intéressement, actionnariat salarial ou populaire, patrimoine « corporatif », etc.), espaces qui réunissent tous les acteurs de l’activité économique locale, communale, régionale ou nationale, y compris en y intégrant des acteurs extérieurs et étrangers (mais qui ne devront pas avoir vocation à diriger ce qui doit rester aux mains des producteurs locaux) comme les investisseurs ou les représentants des institutions internationales (ceux de l’Union européenne, par exemple) ayant une part dans l’activité économique concernée.
A l’heure où la République tremble devant les oukases de la Commission européenne et les injonctions d’un Marché devenu incontrôlable, il est temps d’en appeler, fortement, à l’instauration d’une Monarchie sociale pour la France, non par caprice ou utopie, mais par réalisme et nécessité !
C’est, d’ailleurs, sur le terrain social, que le royalisme a, aujourd’hui, le plus de chances de faire entendre sa « musique particulière », au travers de la contestation des mesures antisociales de cette « Europe-là » et de cette République hollandaise si oublieuse de ses promesses électorales de justice sociale… Mais, au-delà de cette régence sociale que nous assumons, il faut poser, ici et maintenant, les conditions d’une vraie politique sociale inscrite dans le marbre des institutions à venir…
Le défi n'est pas de partager des richesses mais d'en créer.
Cet angle d'attaque solidaire court à l'impasse car le bien-être de chacun ne peut provenir que de son propre travail par respect pour soi-même ; et il ne s'agit dès lors que d'encourager les vrais producteurs d'emplois à prospérer pour voir le travail se répandre.
La France n'a rien compris, sans doute une conséquence tardive de la Révocation de l'Edit de Nantes et de l'exaltation de la rente !
Rédigé par : Catoneo | 11 août 2013 à 15:06
Il y a eu une telle coupure avec la monarchie traditionnelle depuis 1789 qu'il n'est pas certain que, si on instituait jamais une nouvelle monarchie, elle serait comme vous dites. J'en doute fort. Et puis, la dérive actuelle de la République, vers justement une sorte de système "monarchique", comme le disait par exemple François Furet, ne nous indique-t-elle pas plutôt de nous diriger vers une véritable République, à la romaine, enfin honnête et rationnelle ? Les gens veulent d'abord des conditions de vie décente, pas des délires politiques, certes esthétiques, mais qui ne tiennent pas, et qui n'ont plus guère d'écho, d'ailleurs.
Rédigé par : Lorrain | 11 août 2013 à 15:13
@ Lorrain : je ne suis pas un nostalgique de la monarchie d'antan mais je cherche à préparer les fondations d'une nouvelle monarchie sur des critères d'utilité publique et éminemment politique. D'où cette proposition institutionnelle d'une monarchie qui serait fondée sur le service public et social et, par suite, sur la nécessaire justice sociale. Pour autant, je ne néglige pas le présent et les "combats d'urgence" sociaux (lutte contre la pauvreté et la précarité sociale, etc.) : une manière d'assurer une forme de "régence sociale", en attendant mieux... Cordialement.
Rédigé par : Jean-Philippe Chauvin | 04 septembre 2013 à 23:29
Merci pour cette réponse, qui ne répond cependant pas entièrement à mes interrogations sur l'idée de rétablir la monarchie. Bien sûr, vous insistez sur la dimension sociale. Et là vous êtes assurément dans la droite ligne de Maurras. Mais à vous lire, on comprend mal ce qu'une refondation monarchique apporterait de neuf par rapport à la démocratie, et en quoi elle aurait une chance supplémentaire de réussir. Cordialement.
Rédigé par : Lorrain | 07 septembre 2013 à 00:07