Georges Bernanos s’indignait, de son temps, de l’index noirci par l’encre pour les besoins de la carte d’identité qui lui semblait une remise en cause de la liberté de la personne : que dirait-il aujourd’hui au regard des nouvelles exigences du passeport biométrique ? Nous voici dans un monde où notre identité sera désormais aux mains de l’Etat ou de Puissances (politiques, administratives ou économiques) que nous ne maîtrisons pas et qui, parfois, en saurons plus sur nous que nous-mêmes, en particulier dans le domaine génétique, au risque d’en subir les conséquences sur le plan social si est détectée une « faiblesse » médicale quelconque dans notre patrimoine génétique
Le cauchemar du monde de « Bienvenue à Gattaca » (film prophétique ?), qui semblait hier appartenir à un avenir improbable, voire impossible, est en train, dans l’indifférence générale, de se réaliser, au nom de la sécurité et du « bien-être »
Mais cette transparence absolue peut s’avérer mortelle, comme le signale « Le Monde » dans son édition du 28 septembre, à propos d’un drame récent évoqué au palais de justice de Lyon : « Un homme se serait suicidé en juin en apprenant à la lecture de la copie intégrale de son acte de naissance, nécessaire à l’établissement de son passeport, qu’il était un enfant adopté. » Conséquence terrible d’une volonté de contrôle sur les identités personnelles, au détriment même des « secrets de famille » qui, pourtant, ne devraient relever que du domaine de la vie privée.
Ainsi, en cette société voyeuse dont les différentes émissions de télé-réalité (sic !) ont montré le caractère malsain, la famille comme la personne sont désormais condamnées à la transparence, qu’elles le veulent ou non. De plus, jadis, l’identité nous était demandée et nous tendions nos papiers (ou non) ; désormais, même plus besoin pour les sociétés de contrôle de nous demander notre avis puisqu’elles la connaîtrons d’un simple regard ou d’un simple clic (gare aux erreurs informatiques et aux virus
). Dans ce cas, où est la liberté personnelle, la liberté d’être et de réserver le secret de son être propre aux êtres aimés ou amis ?
Le secret, ou la mise en retrait, la réserve, seront-ils encore possibles demain, au risque de passer pour des êtres associaux, donc marginaux ? François-Marin Fleutot, dans une petite causerie non-conformiste dont il a le secret, dénonçait la République comme ce régime qui avait créée la trop fameuse « loi des suspects » et qui, par cette législation proprement barbare, avait ouvert un chemin vers le « contrôle total » auquel nos sociétés semblent vouloir aboutir comme pour se protéger de ses propres citoyens.
Personnellement, je me souviens d’avoir vécu quelques années sans papiers d’identité, et cela parce que, dans ma ville, j’étais connu et qu’il s’était établi entre les commerçants (et les postiers
) et moi un rapport de confiance qui ne nécessitait ni papiers ni démarches administratives : cela serait-il encore possible aujourd’hui ? Ainsi, en voulant tout contrôler de ce que nous sommes et faisons, la « Démocratie du soupçon » nous contraint de plus en plus à « paraître », plus qu’à être et penser.
« Qu’avez-vous à cacher ? », me dira-t-on : ma réponse est « Qu’avez-vous à me reprocher pour ainsi me suivre du regard, encore et toujours ? ». De toute façon, j’assume ma vieille formule, celle que j’évoque parfois à mes élèves : « La liberté, ça ne se renifle pas, ça se respire ». C’est aussi pour cela que je suis, sans complexe, comme Bernanos, royaliste et fier de l’être
Tant pis pour la « police de la pensée », je respire sans me soucier d’elle, et je tire la langue aux caméras de contrôle, vecteurs de la transparence obligatoire
Me voilà de retour pour quelque temps.
Mes parents défendent ce point de vue depuis bientôt 10 ans. Dans le temps, ils récoltèrent mes moqueries. J'espère être plus lucide aujourd'hui.
Rédigé par : Princesse Palatine | 28 septembre 2006 à 16:40
Le monde, je pense, est entrée dans une société de peur, et les hommes pensent que plus on est surveillé, mieux c'est pour notre sécurité. Il est vrai que savoir que l'Etat ou un service public puisse connaitre plus de chose que nous sur nous-meme, ça devient un peu absurde! Se protéger contre le terrorisme, limité la clandestinité daccord, mais n'a-t-il pa d'autres moyens. On est maintenant surveillé de partout, ceux qui nous surveillent sont eux-mêmes surveillés et ainsi de suite. Ce surplus de surveillance est, je crois, innécessaire.
Rédigé par : Séb V | 28 septembre 2006 à 17:40
Hiyah, m'sieur Chauvin unleashed!
Aujourd'hui, on prend les gens par la peur, en leur montrant que, tout autour de leur pavillon, ne règne que la peur et l'intolérance. Mais j'ai vu bien plus d'intolérance, de connerie, et de fierté mal placée à Hoche qu'à Trappes...
La seule chose à faire, c'est vivre, et se souvenir qu'on a un corps, une respiration, un coeur qui bat; et qu'un jour, un homme a dit "pour tout bien l'or de leur regard...", ou qu'un autre est mort par le sabre en hulant une derniere fois à la face du Japon mourant..
Rédigé par : Hugo | 28 septembre 2006 à 18:13
- Dans la dite Antiquité, les empires contrôlaient leurs populations de manière assez poussée. Les Britanniques vivaient jusqu'à maintenant sans carte d'identité... Leurs paroles suffisaient pour établir qui il étaient. La société progresse (au sens de cheminer, d'avancer dans le temps) et contrôle mieux les individus. Mais tout est relatif ! Il n'y a rien d'absolu. La technique est applicable par des gens : ni l'une ni l'autre sont parfaits. L'imperfection du monde nous sauvera, peut-être ! Ou bien l'usure bien naturelle de toute chose... L'URSS a cessé d'exercer un contrôle efficace avec la fin des croyances. Le système est tombé sans un coup de fusil (ou presque). Méfions-nous de toute idéologie même faite de bons sentiments et d'informations données par les médias. Non ? Les médias ne sont pas toujours la réalité.
Rédigé par : Périclés | 28 septembre 2006 à 22:39
Au temps de la loi des suspects il fallait inscrire son age au bas de son immeuble.
Une actrice met 34 ans
Un voisin lui fait remarquer qu'on lui en donne plutôt 43.
Elle répond
On me les donne, mais je ne les accepte pas!
Rédigé par : l'homme dans la lune | 02 octobre 2006 à 23:41
L'homme a démissionné.
Il a tout donné à la société automatique de contrôle et développement de l'espèce.
Il suffit de voir une fois dans sa vie l'effroi qui s'empare de trois douzaines d'agneaux serrés dans un compartiment de métro quand deux voyous attaquent une fille ou un type décalé qui les a dévisagés, pour savoir que nous sommes bons pour la puce électronique implantée dans le lobe d'oreille comme on tatoue les animaux de compagnie.
Ca existe déjà dans certaines boîtes de nuit en Espagne.
Nous dégénérons ...
Rédigé par : catoneo | 04 octobre 2006 à 14:14