A la veille d’une élection présidentielle qui s’annonce très ouverte et sur laquelle j’évite soigneusement de faire des pronostics, l’historien et politologue René Rémond vient de mourir à l’âge de 88 ans. Il est celui qui, l’un des premiers, s’est penché sur l’histoire de la Droite et qui l’a conjugué au pluriel, ce qui convient à la réalité politique française depuis que la notion de « Droite » existe, c’est-à-dire, plus que depuis l’année 1789, depuis la Restauration de 1815, après les Cent-jours.
Bien sûr, sa distinction entre trois Droites, légitimiste, orléaniste et bonapartiste, peut se discuter et je préfère d’autres types de différenciation des Droites, fondés sur, par exemple, le rapport Autorité-Liberté, le rapport à l’Egalité, la question de la légitimité et de la place du Politique ou, encore, sur la question de la répartition des pouvoirs : j’avoue que je suis parfois hésitant, du coup, à spécifier trop rigoureusement tel ou tel mouvement, tel ou tel intellectuel, car, même au sein des partis, il peut y avoir de grandes disparités, même si ce sont les points communs et d’ancrage des uns aux autres qui vont définir politiquement la structure ou la personnalité évoquée.
Je me souviens que j’avais essayé jadis de caractériser le courant d’Action Française et que, de par son royalisme politique et son attachement aux libertés provinciales mais aussi communautaires, je l’avais alors qualifiée de l’étiquette étrange d’ « autoritaire-libertaire »
Il se trouve que, quelques années après, j’ai discuté avec René Rémond (lors d’une Journée du livre politique à l’Assemblée nationale), sur les idées de Maurras en évoquant son attachement aux idées fédéralistes : l’historien, pourtant de tradition démocrate-chrétienne opposée fortement et historiquement au courant maurrassien, m’avait alors véritablement surpris en m’expliquant combien Maurras avait eu raison sur ce plan comme sur d’autres, en particulier diplomatiques
Ma théorie sur le côté « autoritaire-libertaire » de l’AF ne l’avait pas choqué, même s’il n’y adhérait pas exactement. Je l’avais quitté au bout d’un quart d’heure en me disant qu’il serait peut-être fort intéressant pour le mouvement royaliste d’engager un débat avec cet historien qui reconnaissait tout l’intérêt politique (ce qui ne vaut évidemment pas adhésion) de l’Action Française. Aussi, je n’ai pas été surpris d’apprendre, il y a un mois, qu’il devait présider l’une des séances du colloque organisé au Centre d’Histoire de Sciences Po sur ce thème des sociabilités et cultures de l’Action Française : mais le mal qui devait finalement l’emporter l’a empêché de pouvoir être présent et, au regard de notre courte discussion passée, j’en ai conçu quelque regret.
Il aura, en tout cas, ouvert la voie à de nombreuses réflexions et recherches sur les Droites, et les royalismes français (ou les diverses déclinaisons du royalisme
) doivent y retrouver toute leur place, depuis 1789 jusqu’à nos jours, même s’il serait fort nécessaire aussi que les royalistes d’aujourd’hui ne se contentent pas de mimer ceux d’hier dans une posture parfois tout aussi ridicule que vaine
En passant, B.RENOUVIN le trouvait insignifiant.
Rédigé par : Périclés | 26 juin 2007 à 22:50