Comme vingt millions de mes compatriotes, j’ai regardé la rencontre de rugby opposant l’Angleterre (la perfide Albion, diraient certains...) à la France : comme eux, j’ai vibré, tremblé et été déçu par le résultat final défavorable à l’équipe tricolore. Mais ce qui m’a intéressé, au-delà même de la compétition, c’est l’esprit de ce sport qui, s’il est démonstration de force et d’énergie sur le terrain, ne donne pas lieu aux déchaînements ou aux contestations d’arbitrage désormais apanages des rencontres de balle-au-pied, malheureusement. Sans doute ce dernier sport devrait-il prendre exemple sur le rugby pour retrouver un peu plus de sérénité et de popularité.
Ce qui m’a frappé, c’est aussi que le « nationalisme » volontiers cocardier qui s’est manifesté lors de cette coupe du monde de ballon ovale n’avait pas ce caractère outrancier, voire belliciste, que l’on voit en d’autres occasions : en me promenant à Paris samedi après-midi, j’ai croisé des foules festives et animées, aux couleurs des deux équipes rivales, et qui riaient ensemble, sans agressivité, levant leur verre à leur équipe respective, dans une ambiance véritablement bon enfant. Pas de « hooligans », pas de cris de haine !
Pour les Français, cette coupe de monde a été l’occasion de « se retrouver » en un « nous » national, de reprendre les rites de l’appartenance que sont « la Marseillaise » et le drapeau tricolore, de se trouver de nouveaux héros comme le désormais mythique Chabal, sorte de Vercingétorix moderne ou de Surcouf rugbystique qui ose défier le « politiquement correct » en répondant (en anglais) à un journaliste britannique que « lorsque l’on est en France, on parle français », avant de quitter la salle de presse... Certes, cela n’est que du sport, mais c’est sans doute aujourd’hui une des modalités du « vivre ensemble » au moment où la nation elle-même doit faire face à des remises en cause de plus en plus brutales par la globalisation économique ou plus insidieuses par la « construction européenne » : la méconnaître ou la surévaluer serait également se tromper.
On pourrait longuement disserter sur les bienfaits (thèse) de ce "patriotisme" de substitution... dans lequel (antithèse) on pourrait voir aussi un forme abâtardie d'un populisme jacobin, alors que les vertus aristocratiques du sport conduisent à préférer le meilleur, le plus doué, le plus fort (même si aujourd'hui hélas il faut rajouter le plus travailleur, le mieux entraîné voire le mieux dopé)... C'est pourquoi j'ai toujours préféré l'américain Mac Enroe à l'européen Borg, le football brésilien à tout autre et (oh sacrilège) le rugby des blacks aux rugbys du nord...
Mais ne dissertons pas trop, mon cher JP, car je te rappelle que tu m'as promis récemment deux réponses à des commentaires laissés sur ce blog...
Rédigé par : Yffic | 15 octobre 2007 à 22:30