La Constitution de la Vème République n’en finit plus d’être modifiée, triturée, et aujourd’hui « sarkozysée » : il n’y a plus une année sans Congrès à Versailles pour un nouvel arrangement constitutionnel, au point que l’esprit des institutions voulues par le général de Gaulle semble bien mal en point. Notre pays à la liberté retrouvée à l’époque gaullienne, dans une certaine tradition capétienne, est devenu une simple province touristique de cette « Europe » qui, elle non plus, n’est plus libre de ses mouvements, prisonnière de la politique états-unienne, pour le meilleur et pour le pire, dans le cadre de l’Otan, véritable bras armé de la diplomatie de Washington. Ce ne sont pas les piètres arguments de M. Hervé Morin, ministricule de la Défense, qui pourront me démentir, à l’heure où celui vante cette « alliance emprisonnante » tout en rechignant à faire construire un second porte-avions, cela au moment même où la Chine et d’autres pays, pourtant beaucoup plus « pacifistes », s’en procurent, et que nous n’avons plus AUCUN porte-avions sur les mers actuellement (le Charles-de-Gaulle est immobilisé à quai encore un an…). Comment peut-on alors peser sur une scène internationale de plus en plus mouvante et sur laquelle montrer sa force (sans avoir à s’en servir toujours, heureusement !) est le meilleur moyen d’être crédible et d’être, simplement, écouté ?
En tout cas, les modifications constitutionnelles, nouvelle « habitude institutionnelle » comme on pourrait ironiser, vident la Vème de sa substance et, tout royaliste que je suis, je n’en suis pas satisfait car, dans l’époque actuelle, c’est affaiblir ce qui pouvait rester de « capétien » dans une Constitution que de Gaulle envisageait peut-être comme une forme de « régence », en attente d’une vraie Monarchie…
Ainsi, la volonté du Président Sarkozy de se présenter pour promouvoir et défendre sa politique devant les parlementaires (ce qui aujourd’hui le rôle du premier ministre) ne me semble rien d’autre qu’une forme de présidentialisation qui, loin de rapprocher d’une logique monarchique traditionnelle française, rapproche d’une véritable formule « monocratique » de la République et qui, en même temps, risque, au contraire de ce qui est évoqué par ses partisans, de transformer le Parlement en simple chambre d’enregistrement bavarde et « spectaculaire »… Etant plutôt méfiant à l’égard de la Chambre des députés (vieux reste d’antiparlementarisme hérité de 1934 et de 1958 ?), je suis partisan d’une forme de bicaméralisme dans laquelle le Sénat serait une Chambre des provinces, des communes et des métiers, et la Chambre des députés, une assemblée représentative des grandes (mais aussi des petites, qui ont aussi des choses à dire, parfois fort intéressantes) mouvances politiques partisanes, chargée de débattre et de proposer plutôt que de décider pour tous les aspects de la vie du pays, souvent en n’étant d’ailleurs depuis des années que la chambre de retranscription des directives européennes en lois françaises… Je suis plutôt partisan d’une décentralisation législative qui redonne une partie des compétences actuelles des assemblées parisiennes aux assemblées régionales et aux conseils municipaux, avec un Etat arbitral qui puisse garantir un certain équilibre entre les instances décentralisées et une meilleure redistribution des ressources disponibles, un Etat qui donne la direction générale et représente la nation à l’extérieur…
En somme, un Etat dégraissé mais « musclé » ; un Etat fort mais juste, qui soit capable de rester ferme face aux groupes financiers et économiques et qui ne laisse pas ceux-ci décider à la place du Politique ; un Etat libre et libérateur qui rende la parole aux citoyens et à leurs corps civiques, et évite l’omniprésence administrative tout comme l’abstention et l’absence politique (cas de notre actuelle République…) ; etc.
Si la Vème République a perdu beaucoup de son sens et intérêt premiers, elle reste tout de même une référence importante qu’il serait dommage de sacrifier sur l’autel d’un « changement pour le changement », souvent démagogique et vain par essence. Je ne suis pas un nostalgique de la République gaullienne mais je reconnais facilement qu’elle a restauré le sens de l’Etat et de sa liberté, et ce sont des éléments forts pour une France qui ne s’ignore pas. Cette « régence du nationalisme », si elle reste incomplète (comme toute régence…), mérite d’être préservée et améliorée, en attendant mieux…
Le porte-avions est un système d'armes offensif. Qui avons-nous l'intention d'attaquer ?
Si nous l'utilisons comme base d'observation voire hôpital flottant, c'est se foutre du monde, du moins des contribuables.
Les Anglais ne feront sans doute pas les leurs pour cette raison.
Il suffit d'une politique de bases outremer et d'une escadre de frégates avec deux porte-helicoptères si on veut jouer dans la cour des grands.
Le PA est de l'orgueil onéreux et très mal placé, classique de la posture gaulliste, toute de frime grandiose.
Rédigé par : Catoneo | 25 avril 2008 à 11:18
Sur le fonds. Je ne sais pas si le bicaméralisme est adapté à un pays centralisé comme la France. Le Sénat des Etats-Unis (qui ne compte que 100 membres !) est appliqué sur une Fédération de 50 états. Le Bundesrat allemand est la fédération des provinces historiques d'empire, les lander. En France, le palais de Luxembourg est devenu un mouroir politique hypertyrophié.
Un parlement national de 300 députés me semble être le bon format.
Je serais assez réservé sur les parlements régionaux qui acroîtraient les satrapies et accumuleraient les différences de traitement du citoyen. Si l'égalité devant la loi prévaut, pourquoi exalter une provincialisation des décisions ? Ou bien il ne s'agit alors que d'y répartir la charge fiscale imposée par la capitale, comme le faisaient certains parlements du royaume.
Je suis d'accord avec vous que le régime courant n'est que l'ombre de la V° République d'origine qui reçut d'ailleurs sa première salve en 1962. Nous avons le génie des constitutions, évolutives comme celle-ci ; ce qui veut dire que nous n'y croyons pas une seconde, quoique nous nous disions un pays de droit écrit, du moins au sud de la Loire.
Le dispositif sarkozien est une sorte de dosage de circonstance, fait par M. Balladur, car il fallait bien faire faire queqlue chose au géniteur politique du président. A la fin on nous dessine une chimère. Je ne pense pas qu'elle puisse "accoucher" d'un royaume stable.
Pour que notre pays s'arrache à son déclin, il faut d'abord diviser l'Etat par deux. Les nombreuses représentations nationales et subalternes sont à prioriser dans cette réduction de voilure. Que sont les assemblées consulaires des CCI et leur assemblée permanente ? Les assemblées de régions croupions comme le Limousin, la Corse ? Le Conseil Economique et Social ? Une Assemblée nationale de 577 sièges alors que la House de Washington n'en a que 435 ! Etc.
La priorité est de dégonfler.
Rédigé par : Catoneo | 25 avril 2008 à 13:04
Sur le porte-avions : je dois avouer que je ne suis pas exactement un spécialiste mais,si je suis bien d'accord sur le fait d'avoir une politique fondée sur les bases d'outre-mer et les porte-hélicoptères, je me demande néanmoins s'il n'est pas tout de même intéressant d'avoir des équipements lourds pour pouvoir réagir au loin, sans forcément dans un cadre offensif mais dans une optique de dissuasion, toujours utile dans des situations de tension diplomatique. La Chine est en train de se pourvoir en porte-avions pour pouvoir montrer sa mobilité et ses désirs de dépasser sa simple aire traditionnelle d'influence.
L'un des problèmes qui se pose à l'armée française est le coût exorbitant de tels équipements : comment faire, en ces temps de restriction budgétaire, pour financer ses matériels ? Je n'ai pas, a priori, de réponse toute faite.
En tout cas, le débat continue !
Rédigé par : J.-P. Chauvin | 28 avril 2008 à 11:29
Les Chinois se sont déclarés propriétaires de toute la Mer de Chine méridionale jusqu'à l'île de Natuna (exclue ou incluse, ce n'est pas clair). Cette "souveraineté" comprend toutes les îles, même celles à portée des côtes riveraines.
Aucun des pays riverains n'est d'accord. L'escadre offensive de PA en cours d'organisation est d'abord destinée à les menacer.
Nous ne sommes pas dans cette démarche hémémonique.
Rédigé par : Catoneo | 29 avril 2008 à 12:43
Je suis d'accord avec Catoneo sur la nécessité de privilégier des équipements légers d'intervention, mais je n'approuve pas que comme toujours, le sujet serve d'attaque contre le Général.
Auparavant, le contexte justifiait la construction de porte-avions.
N'y-a-t-il pas un parallèle à faire, entre l'infidélité des Français au legs du général, et le résultat d'une France aujourd'hui bonne à rien ?
Rédigé par : Karolus | 29 avril 2008 à 14:24
Monsieur,
Rappellons que la France reste l'un des seuls pays au monde à posséder un porte-avions opérationnel (parfois), dont les performances ont été admirés par nos alliés américains lors d'exercices communs en Atlantique - souvenons nous d'ailleurs que la formation de nos pilotes de l'aéronavale est confiée à l'US Navy. Il s'agit, sans chauvinisme, d'un des vaisseaux les plus modernes au monde. Le club des pays possesseurs de porte-avions est extrêmement fermé (nous sommes même le seul pays européen membre, la flotille de porte-hélicoptères britanniques, bien que dotée d'avions à décollage vertical, les Sea Harrier, est d'usage différent). Les Etats-Unis ont la plus grande flotte au monde, mais avec des porte-avions souvent vieillissant, et les quelques reliques françaises vendues au Brésil ou britanniques, à l'Inde, sont peu efficaces.
Il est vrai cependant que la Chine se dote en ce moment à grand frais de ce formidable outil de supériorité maritime et force de projection ultime.
Comme signalé par un internaute, il n'est pas certain que l'usage d'un tel outil, bien qu'arme de prestige, ne se justifie pleinement aujourd'hui, pour notre pays. Toutefois, comme vous le faites remarquez, il est quelque peu absurde, quand on a décidé d'utiliser cette arme, de ne pas posséder deux de ces engins, ce qui permettrait de toujours disposer de ses services. Mais le coût reste colossal (plus de 3 milliards d'euros pour le navire et quelques 30 millions pour chaque Rafale Marine)
Un ancien élève du jardin, n'ayant pas eu le privilège de vous avoir comme professeur
Rédigé par : Felix | 04 mai 2008 à 14:05