L’affaire Proglio n’est pas finie ! La semaine dernière, la presse révélait que, après avoir officiellement renoncé à son salaire supplémentaire de Veolia de 450.000 euros alors que sa paye annuelle de patron d’EDF s’élève déjà à 1,6 millions d’euros, M. Proglio allait néanmoins toucher annuellement environ 1 million supplémentaire au titre d’une retraite-chapeau, toujours accordée par l’entreprise Veolia, celle-là même dont il est issu et qui se prépare à être fusionnée avec EDF… Cette information, moins médiatisée que la précédente sur les 450.000 euros, n’a pas vraiment soulevée d’indignation chez nos compatriotes, seulement une sorte de fatalisme du type « ils font ce qu’ils veulent et ils se foutent de nous, mais on n’y peut rien, c’est comme ça… ».
On apprend aussi ce lundi matin que M. Proglio va quitter ses fonctions d’administrateur de Natixis, cette même banque d’affaires étant à l’origine de la ruine de milliers de petits actionnaires à qui les conseillers bancaires de la Caisse d’épargne et des Banques Populaires avaient vendu des actions dont le cours s’était effondré quelques temps après ! Ainsi, ce monsieur, qui cumule encore une vingtaine de fonctions et de postes dans de multiples sociétés (et les avantages financiers qui vont avec…) autres que l’EDF, peut-il partir tranquillement de son poste d’administrateur alors que ses « compétences » n’ont pas consisté en autre chose que, avec ses collègues, « planter » des milliers de personnes, clients de banque trop confiants en la parole de celles-ci, et toucher, pour ses « mérites » sans doute, 30.000 euros annuels de « jetons de présence »…
Mais de qui se moque-t-on ? Comment l’Etat peut-il confier à un tel personnage, si douteux quant à ses « qualités » professionnelles et si immoral quant à ses revenus financiers et, au-delà, à ses revendications salariales, les rênes d’une entreprise nationale comme l’EDF ? Est-ce sa proximité avec l’actuel locataire de l’Élysée qui lui vaut tant « d’honneurs », terme dont le pluriel, ici, s’accorde mal avec le véritable sens du mot au singulier ?
La République des copains et des coquins ! Des copains tarifés, pourrait-on dire !
Il fut un temps où de telles pratiques et de tels scandales (et M. Proglio à lui seul en est plusieurs à la fois !) provoquaient des indignations qui n’étaient pas que de plume : en 1887, l’affaire des décorations qui impliquait le gendre de Jules Grévy, alors président de la République, avait contraint ce dernier à la démission après les virulentes protestations des opposants mais aussi des partisans de la toute jeune République troisième du titre ; en 1892, l’affaire de Panama entraînait le discrédit de la République des « chéquards » et les manifestants monarchistes et « populistes » criaient « A bas les voleurs » devant la Chambre des députés, tandis que, quelques mois après, de nombreux parlementaires (tous républicains, sauf un !) étaient éliminés aux élections suivantes ; et puis, comment ne pas citer le 6 février 1934, aujourd’hui diabolisé par les bien-pensants, mais qui, sous l’impulsion des royalistes de l’Action Française et des camelots du Roi, fit trembler une République aux abois et ébranlée par l’affaire Stavisky, escroc proche des milieux politiques et parlementaires du tout-Paris ?
Mais il faut dire un mot de la suite de ces mécontentements populaires : à chaque fois, ce fut la même tactique de la République et du Pouvoir en place, c’est-à-dire « la République en danger » et « l’appel aux vrais républicains », le but étant d’éviter une remise en cause du système qui faisait (et fait encore) vivre tant de politiciens (ceux que le général de Gaulle appelait « les politichiens »…) ! Ainsi, ce sont les victimes qui furent une fois de plus flouées et, en plus, désignées à la vindicte populaire, dans un retournement sémantique et proprement scandaleux ! Alors, désolé, mais qu’on ne me demande pas de bénir cette République indécente et sa classe dirigeante si malhonnête !
La République de M. Proglio ne mérite pas que le seul mépris, elle mérite la colère, la révolte, la destruction : en somme, la révolution, celle que Maurras qualifiait, en la souhaitant, de « rédemptrice » et qu’il nommait Monarchie…
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