Je suis actuellement à Lignières où se tient l’Université d’été d’Action française et, sans doute pris dans l’ambiance à la fois festive et studieuse de ce 54ème Camp Maxime Real del Sarte, j’y reste plus longtemps que prévu, au moins jusqu’à samedi midi, ce qui me permettra d’assister à la table ronde sur la Chouannerie réunissant Reynald Sécher (historien de la Vendée et de la Bretagne), Anne Bernet (spécialiste des guerres de Vendée), etc.
Cette Université politique regroupe cette année environ 70 personnes, principalement des étudiants et lycéens, et elle apparaît comme un microcosme de la France et de ses diversités provinciales comme sociales : ainsi, cela est fort sensible lors des repas qui sont l’occasion d’entendre des chants, non seulement en français bien sûr, mais aussi en breton, en provençal (la langue natale de Mistral et de Maurras) ou en nissard (le parler du comté de Nice). Après tout, cela illustre par le fait la fameuse citation de Maurras : « La France intégrale, c’est la France fédérale ». Et cette diversité linguistique m’apparaît comme heureuse, comme une véritable richesse culturelle qui n’empêche pas, bien au contraire, d’écouter et de comprendre les autres : la langue unique appauvrit l’esprit en limitant le mode d’appréhension au monde à une seule voie. J’en suis d’autant plus conscient que, plus jeune, j’étais totalement rétif aux langues étrangères et qu’il m’a fallu attendre de découvrir à la fois l’existence concrète des autres langues de France et l’intérêt de lire dans le texte certains écrivains allemands ou anglais, pour comprendre toute l’importance de cette diversité qui, par nature, empêche la « globalization » (comme le disent et l’écrivent les Anglo-saxons), c’est-à-dire l’arasement des différences et l’établissement « pour motifs économiques » d’une langue, donc d’une pensée, unique qui est, comme chacun le sait, celle de la thalassocratie commerçante états-unienne.
Cela étant, il me semble que toute langue n’a pas forcément « vocation à l’universel » : les langues provinciales françaises, qui sont des marques de l’enracinement dans une « matrie », et qui doivent vivre et si possible prospérer dans leur cadre territorial historique, n’ont pas la même fonction ni le même poids que la langue française, celle des rois de l’Ile-de-France au Moyen-âge, qui est devenue, par le fait et le Droit (l’édit de Villers-Cotterêts de 1539), la langue de l’administration politique, puis la langue commune des Français au XIXème siècle (la politique de francisation « gratuite, laïque et obligatoire » d’un Ferry, peu respectueuse des traditions et des parlers locaux pour cause de « République une et indivisible »
), et une langue de référence internationale au temps où l’Economique n’imposait pas encore ses propres choix au Politique
En tout cas, il est certain que si la langue française venait à se cantonner au seul territoire étatique français, elle serait condamnée, à plus ou moins long terme, à disparaître devant la pression conjuguée de l’anglo-saxon économique et des langues provinciales qui, elles-mêmes, seraient les victimes suivantes de la « langue unique globale »
Ainsi, défendre le français au plan international comme national, c’est défendre la possibilité d’un multilinguisme nécessaire autant pour la pensée et la discussion que pour l’enracinement des personnes qui ne sont pas que des individus interchangeables et « statistiques ».
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