« Tant vaut l’Etat, tant vaut sa raison », disait Maurras. Les évènements des derniers jours l’ont obligeamment démontré, si besoin en était encore ! Après quelques semaines d'errance politique et diplomatique, la République sarkozienne tente un redressement dont il n'est pas sûr qu'il soit suffisant pour redonner confiance aux Français mais aussi aux Etats et aux populations qui attendaient tant de la France.
C'est Anatole France qui, bien que républicain (certes désabusé...), affirmait que la République n'avait pas de politique étrangère, même si Théophile Delcassé au début du XXe siècle avait tout de même essayé de faire mentir cette assertion, et que la République issue de la volonté gaullienne avait permis de renouer en partie avec la diplomatie des Vergennes et Choiseul. Mais, les efforts de Védrine et de Juppé dans les années 1990-2000, et celui de Dominique de Villepin et du « grand refus » de 2003 face aux États-Unis, ont été ruinés par la calamiteuse diplomatie sarkozienne depuis 2007, dont Bernard Kouchner fut l'illustration la plus honteuse et Michèle Alliot-Marie la victime expiatoire...
Alain Juppé aura fort à faire pour restaurer l'image de la France, et, surtout, son influence dans le monde, et il n'est pas sûr qu'il y parvienne car le président Sarkozy ne semble pas encore avoir totalement compris que la diplomatie n'est pas un simple marchandage mais qu'elle exige une vision à long terme et parfois une « politique d'altitude ». Comment pourrait-il le comprendre, lui qui ne pense plus qu'à sa propre réélection et qui ne peut se défaire d'un véritable « tropisme occidental » qui n'a que peu à voir avec la tradition capétienne pour laquelle « les alliances sont saisonnières », comme l'avait bien compris le général de Gaulle ?
Faut-il, pour autant, désespérer de la diplomatie française ? Non, car la France reste une puissance dotée du deuxième réseau diplomatique du monde par ses ambassades et sa présence internationale, mais aussi par son siège au Conseil de sécurité de l'ONU, siège qu'il ne faut, pour rien au monde, sacrifier à une illusoire représentation de l'Union européenne, comme le souhaitent certains européistes brouillons. La France a des moyens, il lui faut à nouveau « la volonté politique d'être », et c'est par sa liberté historique, sa liberté d'esprit comme de pratique, parfois agaçante pour nos alliés mais nécessaire et espérée par les peuples du monde, c'est par sa « libre action », éminemment française, qu'elle peut retrouver sa place sur la scène internationale.
Mais, pour pratiquer cette liberté qui est sa force, la République quinquennale et des apparences, la République des oligarques et des « experts » est-elle le meilleur outil de la France ? C'est peu probable, et il faudra bien, si l'on veut inscrire notre puissance diplomatique dans la durée, dans la pérennité, repenser la question des institutions. Régis Debray, il y a quelques années, avait rappelé que, pour peser sur la scène diplomatique, il manquait « à la République une famille royale » : il n'est pas trop tard pour y penser encore, même s'il peut parfois paraître trop tôt pour y penser déjà...
Mais, « y penser » ne suffira pas toujours ! Il faudra bien pratiquer à nouveau « le nécessaire » : et ce nécessaire, pour mieux incarner la France qui pèse dans le monde, c'est, qu'on le veuille ou non, cette famille royale institutionnalisée, ces visages reconnus dans le monde comme ceux d'une France qui ne meurt jamais, d'une France libre et souveraine, par son Souverain même...