La récente pollution en Chine a mis en évidence la désastreuse situation environnementale dans un pays en pleine expansion économique, et cela malgré la Constitution de 1982 qui accordait une certaine place à la protection de l'environnement.
Comme le souligne, pour le regretter, Nicolas Barré dans "Le Figaro" (27-28 novembre 2005): "Entre le développement économique et la santé de ses habitants, la Chine communiste n'a jamais franchement hésité. Rien ne doit entraver la croissance, et c'est ainsi que, revers du miracle, "l'usine du monde" est aussi devenue sa poubelle".
Selon Jean-Jacques Mevel, dans ce même journal: "Soixante-dix pour cent des fleuves et rivières chinoises sont "extrêmement polluées", de même que 25 des 27 plus grands lacs. (...). Un tiers du pays est victime de pluies acides dévastatrices. Quatre cent mille personnes meurent chaque année de maladies cardiaques ou pulmonaires liées à la pollution atmosphérique (...). Le pays, enfin, compte 20 des 30 villes les plus irrespirables de la planète. (...). De l'autre côté du Pacifique, en Californie, jusqu'à 25 % des particules polluantes qui obscurcissent le ciel de Los Angeles trouveraient leur origine en République populaire, d'après les autorités américaines".
Cette pollution a (et aura) aussi des répercussions économiques: selon Nicolas Barré "les deux tiers de ses réserves en eau sont de mauvaise qualité ou inutilisables, la surface des terres cultivables a été divisée par deux depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale... "Le miracle économique chinois va prendre fin car l'environnement ne suivra pas, s'alarmait récemment le vice-ministre de l'environnement, Pan Yue".
Mais la Chine, consciente des risques, veut relever le défi écologique en orientant sa politique dans une voie moins polluante: "Les menaces sur la prospérité, beaucoup plus que celles sur la santé publique, poussent une Chine avide de diversification dans les industries à haute valeur ajoutée à se développer dans le traitement des eaux, les énergies alternatives et autres technologies visant à économiser les ressources, des spécialités occidentales jusqu'ici. Le 11e plan quinquennal, qui débute bientôt, en fait l'une de ses priorités.
"Chaque nouvelle catastrophe écologique renforce le régime dans sa conviction que la prospérité de l'empire est menacée par les pénuries de toutes sortes. Le développement des technologies vertes constitue un impératif stratégique pour la Chine rouge".
Cela étant, ses "bonnes intentions" risquent, comme le rappelle M. Mevel, de ne pas peser lourd "face à la course au profit, à l'irresponsabilité des technocrates et à l'inexistence de contre-pouvoir".
D'autre part, les pays anciennement industrialisés n'ont pas vraiment donné l'exemple ces dernières décennies.
J'avais émis le souhait, dans une précédente note de novembre, de voir se développer une "diplomatie environnementale" française, destinée à placer la question environnementale et, au-delà, de la qualité de vie même de l'espèce humaine et de la planète, au centre des préoccupations mondiales. C'est aussi, pour notre pays, un devoir que lui assigne son histoire: "Le monde a besoin de la France" affirmait Bernanos et il ne serait pas inutile qu'elle soit capable de donner des conseils et de retrouver son rôle d'arbitrage, là où c'est possible, entre les nations. Encore faudrait-il que l'Etat français lui-même donne l'exemple d'une grande politique écologiste, fondée sur la recherche dans les "technologies vertes", mais aussi sur la réduction des gaspillages et sur un modèle de civilisation fondée, non sur la seule "primauté de l'Argent" ou sur l'individualisme consumériste de masse, mais sur le nécessaire respect des équilibres humains et sur un "personnalisme intelligent". Ce "personnalisme" qui place l'intérêt des personnes et des sociétés humaines avant les seuls intérêts économiques et financiers... A la lecture des programmes des partis de gouvernement, et malgré les efforts, trop souvent ignorés, de quelques "marginaux" (la formule n'est pas péjorative, mais indique juste un positionnement hors des grandes tendances des partis) comme Yves Cochet, Corinne Lepage ou Paul Ariès, ce n'est pas vraiment gagné...