Les émeutes des derniers jours à Villiers-le-bel ont réveillé les souvenirs vieux d’à peine deux années, de ces semaines d’automne 2005 qui se chauffaient aux incendies de voitures et d’écoles. A l’époque, il avait été beaucoup écrit sur le malaise des banlieues, mais aussi beaucoup promis pour résoudre cette arlésienne de la société française depuis plus d’un quart de siècle. Deux ans après, la situation ne semble pas s’être améliorée et, aux dires de mes collègues des Mureaux, elle se serait même aggravée malgré tous les efforts consentis depuis tant d’années par les professeurs des écoles, collèges et lycées de la ville et des environs : la bonne volonté ne suffit pas, il y faut aussi le soutien de l’Etat et une politique sur le long terme pour régler, ou plutôt surmonter, les différents problèmes qui font des banlieues des poudrières sociales toujours prêtes à s’enflammer : on ne fera pas l’économie d’une vraie remise en cause des principes qui régissent une société de consommation et du spectacle, véritable démocratie émotionnelle et superficielle sans civilité enracinée…
En attendant, et sans oublier cette nécessaire réflexion libérée des préjugés égalitaires, il faut bien s’attacher à chercher des solutions d’urgence pour désarmer (à tous les sens du terme, semble-t-il…) les émeutiers, les marginaliser pour mieux en séparer le grain de l’ivraie, aujourd’hui mêlés en une alliance forgée sur le seul refus de l’autorité publique, policière en particulier. Une répression forte des comportements incendiaires n’est pas scandaleuse, loin de là : elle est même nécessaire pour que l’Etat retrouve sa visibilité dans des quartiers trop souvent abandonnés à « l’économie parallèle », mais aussi sa crédibilité, mise à mal par les images désastreuses d’un commissariat en flammes qui, dans cette guerre des territoires, a valeur de symbole du « recul de l’Autorité » au sens institutionnel du terme. Mais elle ne servira à rien si elle ne s’accompagne pas d’une véritable stratégie de « reconquête des territoires », reconquête non pas guerrière bien sûr (même si le terme employé apparaît renvoyer à une stratégie de force qui ne soit pas que verbale) mais bien plutôt politique, économique et civilisationnelle : ce dernier terme n’est pas le moins important, loin s’en faut. Car nous vivons une crise qui n’est pas que sociale, c’est une véritable crise de civilisation et, si je crois au moyen du politique, il me semble évident que celui-ci ne suffira pas à apporter des réponses à une société en doute et qui éprouve les plus grandes difficultés à se penser dans le tourbillon de la mondialisation et du relativisme.
Post-scriptum : j’ai consacré il y a deux ans plusieurs notes de blog à la question des « banlieues » : il me semble, à les relire avec un peu de distance temporelle, qu’elles peuvent répondre à quelques questions sur mes positions et qu’elles restent actuelles, « trop actuelles », même…
http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/deux-victimes-o.html
http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/des-coles-qui-b.html
http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/ebauches-de-pro.html
http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/12/crise-des-banli.html