J'ai déjà évoqué l'affaire des caricatures du Prophète Mahomet dans une note précédente. Mais, depuis deux semaines, cette affaire, à l'origine "danoise", a donné lieu à un vaste débat (ou plutôt "ensemble de débats") en Europe comme dans le monde entier, voire parfois à des violences qui ne laissent pas forcèment bien augurer de la suite des événements.
Mais, ce qui me paraît aussi inquiétant, malgré tout le respect que je porte aux croyants tout en combattant fermement les islamistes (pour des raisons autant politiques que philosophiques), c'est la volonté de certains d'entre eux de vouloir passer par le législateur pour faire condamner, officiellement et légalement, ce qu'ils qualifient d'"islamophobie". Or, et on le constate déjà avec le "délit d'homophobie", cette loi, dont ils demandent la rédaction et le vote, risque de limiter les possibilités du débat et du dialogue, autant entre citoyens qu'entre communautés et institutions : car, où commence et où finit un tel "délit" ? Si, par exemple, je montre dans un cours sur l'Islam médiéval une représentation persane de Mahomet (puisque, dans la tradition persane, le Prophète peut être représenté), serai-je passible des tribunaux, puisque c'est cette représentation qui, pour les sunnites, pose problème ? Si j'évoque les débats sur la vie et la personnalité de Mahomet, serai-je condamné pour avoir blasphémé, alors même que je ne suis pourtant pas musulman et, dans ce cas, seulement professeur d'Histoire ?
Non, décidément, je ne crois pas que cette tentation de régler le débat sur l'Islam par une loi sur "l'islamophobie" soit une bonne chose. En religion comme en politique, le débat, le libre débat, avec tout ce qu'il a parfois de difficile, voire de blessant quand l'adversaire s'en prend aux "défauts de la cuirasse", à vos plus intimes convictions, est une nécessité pour la compréhension entre les uns et les autres, pour la réflexion (politique, philosophique, économique...) et, même, pour (là où c'est possible) faire avancer les choses, faire l'Histoire, ou, au moins, en infléchir le cours. Je crois au libre débat, et j'use de cette possibilité que m'offre aussi ce blog...